Plus la situation générale au Moyen Orient sombre dans le pourrissement, plus Donald Trump y trouve son compte. Le 45ème Président ne va certainement pas envahir l’Irak comme son idole à la gâchette facile, Georges W Bush, un produit de la même couleur républicaine, mais va assouvir son vieux rêve de mettre le monde à ses pieds. « N’y a–t-il pour le milliardaire dépositaire du bouton nucléaire que les pays les plus fragiles ou les plus démunis pour entretenir sa soif de nuire», s’interrogeait un observatoire, bien avant l’assassinat vendredi dernier du général Qassem Souleimani à Baghdad ? «C’est un geste irresponsable de la part de Donald Trump», réagissait de son côté un parlementaire français, ajoutant que «la géopolitique, ce n’est pas le far-west». Ainsi va le monde, le creuset d’une spirale incessante de violences, porteuse de dégénérescence planétaire.
A l’origine de cet acte inattendu qui vous reporte vers le seuil de destruction qu’affiche délibérément la puissance américaine, on trouve plus qu’une simple élimination d’un officier iranien indélicat, gênant, pour la Maison Blanche. A l’apogée des temps modernes de 2020, les héritiers d’Abraham Lincoln, assassiné, ne l’oublions pas comme d’autres présidents américains dans l’exercice de leurs fonctions, perpétuent leurs intentions de contrôler tous les espaces sensibles mitoyens à Israël. Ils rappellent leurs disponibilités à recourir à toutes les purges nécessaires, dès lors que les événements se bousculent dans le giron de Tel Aviv. Il n’y a que Donald Trump à ne point se soucier des réactions internationales relatives, jouant au bel indifférent, puis méprise tout le monde en choisissant de renforcer la présence militaire américaine dans la région.
Trempé dans le caractère d’acier des G’IS, l’occupant du Capitole ignore toutes les protestations diplomatiques officielles, confirmant qu’il s’acclimate parfaitement dans un destin déterminé par une vie politique troublée et de plus en plus fracturée.
Tué par un drone aux abords de l’aéroport de Baghdad et en même temps que l’un de ses lieutenant de 52 ans, Assad Esmaeili, Qassem Souleimani, 62 printemps, incarnait une figure charismatique de l’Iran, une idole, un mythe en action. Son aura rayonnait bien au-delà des armées, au point où le guide suprême de la Révolution iranienne Ali Khamenei, le surnommait le «martyr vivant». Ce commandant de la puissante et prestigieuse brigade des forces spéciales, les Gardiens de la Révolution «au nom d’El Qods» recueillait plus de suffrages et de sympathies auprès de la société, comparativement au président Hassan Rohani, le modéré, et du ministre des Affaires étrangères le fin diplomate Javad Zarif. Une étude publiée en 2018 par l’Université américaine de Maryland, affirmait que 83% des Iraniens expriment une opinion nettement plus favorable en faveur de l’officier supérieur. D’où l’impressionnant cataclysme populaire généré par sa disparition.
D’ailleurs, devant les torrents de réactions politiques, diplomatiques, civiles ainsi que médiatiques à international, américains et européens, se sont interrogés sur le bien fondé de cette élimination. Un journaliste américain a carrément signifié «qu’éliminer un tel personnage revient à commander un double meurtre, celui d’un leader militaire respecté et celui d’un quasi-chef d’Etat». D’autres reporters de guerre attestent et perçoivent Souleimani comme celui qui a vaincu l’Etat Islamique en Syrie.
L’enfant issu d’un milieu modeste à Kerman, s’était déjà révélé lors de la première guerre d’Irak en 1980, avant de personnifier le stratège de la puissance iranienne au Moyen Orient. Son talent de tacticien était admiré par ses alliés et reconnu par ses ennemis. Ces derniers le reconnaissent, lorsque, pragmatique, il a opéré des alliances avec le pire ennemi, l’Amérique, en lui fournissant des renseignements pour combattre les Talibans fondamentalistes en Afghanistan.
Donald Trump a donc commis une erreur, celle d’ouvrir un front nouveau et non maitrisable avec l’Iran. Selon des analystes, cette frappe inattendue cible bien un objectif, celui de dévier l’attention américaine de sa procédure de destitution dans laquelle il est empêtré, de gagner du temps et du terrain pour tenter de se faire réélire, dans un an. Une stratégie dangereuse, qui ne l’émeut pas, même si elle a déjà allumé une déflagration entre les Etats-Unis et l’Iran. La région peut facilement basculer dans le précipice que ça ne gênerait pas Donald Trump. Personne ne parle encore de guerre, mais les belligérants font dans l’escalade. Le peuple iranien et l’ayatollah Khamenei, crient vengeance, et menacent déjà d’attaquer des cibles américaines dans la région. La douleur des Iraniens pourrait-elle se refroidir et contourner une déclaration de guerre ?
En tous les cas, la voix de Donald Trump résonne dans tous les bruits de bottes du monde.
Par Fayçal Haffaf
Par Fayçal Haffaf