L’entêtement de la rente
Les cours du pétrole ont repris des couleurs, ces dernières semaines, après une période plus que stressante pour nos dirigeants, ainsi que pour le citoyen moyen. Tous les Algériens savent, en effet, que nous dépendons des hydrocarbures pour vivre, quels que soit la classe sociale et le niveau intellectuel des uns et des autres. Les derniers chiffres des exportations hors hydrocarbures sont certes intéressants, mais ils demeurent encore très loin de se placer comme une sérieuse alternative à l’or noir. C’est pour cela que les Algériens sont si contents de voir les prix monter et très inquiets de voir le baril se négocier au rabais. Il y a certes quelques petites frictions au sein des sociétés. Certains s’estiment lésés et accusent le gouvernement de mal redistribuer l’argent du pétrole. Ils en veulent pour preuve, toutes ces voitures rutilantes et ses villas luxueuses qui poussent comme des champignons, au moment où des Algériens ne parviennent toujours pas à trouver un toit décent sous lequel s’abriter. D’autres pestent contre le gouvernement tout simplement parce qu’ils ne sont pas parvenus à s’acheter un climatiseur pour se prémunir des chaleurs caniculaires de ces derniers jours.
En fait, l’on a beau crié à l’injustice ou au scandale, il demeure que le bonheur de tout Algérien, quel que soit son statut, est intimement lié à la rente pétrolière. L’on comprend donc aisément qu’un baril à plus de 70 dollars nous permet d’envisager une solution à moyen terme au problème de la pénurie d’oxygène qui pourrit la vie des soignants, sans avoir à payer plus cher le service. Il nous permet aussi de consommer notre semoule et notre lait aux mêmes prix quoi qu’il arrive au plan international. Il nous permet également d’importer plus de médicaments et de pièces de rechange. Bref, le pétrole à plus de 70 dollars nous offre l’occasion de continuer à nous critiquer les uns les autres, à nous poser des questions sur la justice sociale, tout en poursuivant dans notre entêtement à ne pas voir les choses en face, telles qu’elles sont : nous ne créons pas assez de richesses. Nous consommons plus que nous produisons.
La solution serait-elle dans une dégringolade des cours ? Nous avons vécu pendant plus de cinq ans avec un pétrole côté à moins de 50 dollars. Personne ne s’est vraiment posé la question. En principe, pareille perspective ferait vaciller tout l’édifice social pour la simple raison que tout ce que nous avons acquis demeurent encore fortement hypothéqué par la rente. Mais l’Algérie, Etat et société, semble s’entêter…
Par Nabil.G