Accès au logement: Tous les coups sont permis…
Les Oranais, parmi les plus âgés, se souviennent de ces premiers baraquements en tôles et en parpaing, érigées juste après l’indépendance à la périphérie de la ville d’Oran , et qui allaient donner naissance à plusieurs «douars» formant une ceinture de misère autour de la capitale oranaise. Des douars forgés par l’exode des populations rurales fuyant le dénuement et l’absence de toute structure sociale, écoles et centre de santé, permettant une vie décente dans ces zones marginalisées et enclavées, plus tard frappées et meurtries par le terrorisme barbare. Ces douars périphériques, qui portaient déjà les noms connus comme Douar Belgaid, Sidi El Bachir, Bouamama et autres lieux-dits, allaient au fil du temps devenir de véritables agglomérations péri-urbaines installées en ex-croissance anarchique devant être intégrées dans un plan d’assainissement et d’organisation territoriale devenu incontournable.
On se souvient de ces rares opérations de démolition de bidonvilles, très médiatisées et présentées en exploits hors normes à l’actif des décideurs de l’époque, mais qui ne servaient strictement à rien car les sites rasés étaient aussitôt réinvestis par de nouvelles baraques. A l’image du vieux bidonville dit «Cheklaoua», démoli pas moins de quatre fois en quarante cinq ans, et qui n’a finalement été éradiqué qu’en 2013 grâce à l’implantation sur le site d’un projet de réalisation de logements. A défaut de lancer la réalisation d’un projet d’infrastructure quelconque sur le site récupéré après démolition du bidonville, l’habitat précaire et illicite était toujours de retour au même endroit, encouragé par le laxisme et l’indifférence complice de certains acteurs-prédateurs installés dans les rouages de l’administration locale.
Dans la commune d’Es-sénia, la plus frappée et la plus célèbre pour ces bidonvilles à répétition, même une ancienne cité universitaire désaffectée, la CUMO, a été squattée et à ce jour détournée par des familles en quête de logement neuf. Même des classes d’écoles en piteux état, des fourrières municipales, des vestiaires de stades communaux dégradés, des centres de colonies de vacances, et d’autres structures délaissées et abandonnées, ont été occupées et squattées par des vagues d’occupants venant de tous les coins de la région et du pays. Aujourd’hui encore, et depuis quelques temps, profitant de la politique de prise en charge des «zones d’ombre» engagée par les gouvernants, des familles érigent des maisons de fortune donnant naissance à des bidonvilles dans des endroits inondables, souvent sur les berges d’un oued, pour revendiquer un relogement… Même le sable en bord de mer n’est pas épargné par les aspirants à un toit décent qui implantent des baraques pouvant être balayées par la moindre tempête hivernale. Un risque calculé qui serait le prix à payer pour un éventuel accès au logement. Jusqu’à quand ?
Par S.Benali