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«Ghaza» de l’écrivain journaliste Saïd Oussad : les mots pour panser les blessures

Dans son dernier ouvrage intitulé Ghaza, le journaliste et écrivain Said Oussad publie une série de chroniques parus dans le journal Algérie Presse tout au long d’une année, s’étalant du mois d’août 2023 à novembre 2024. Des chroniques consacrées en grande partie à la guerre barbare menée par l’armée sioniste contre le Ghazaouis et qui a fait plus de 48.000 morts et transformé l’enclave palestinienne en champ de ruines.

On redécouvre ainsi les grands moments de cette sale guerre menée par “l”armée la plus immorale au monde” contre un peuple désarmé et livré à lui-même. Et on se laisse emporter par la plume acerbe et déstabilisatrice d’un Said Oussad, fidèle à lui-même, et parfois déroutant. Les mots sont manipulés d’une telle manière que l’amertume ressentie par l’écrivain est fatalement contagieuse, et nous renvoie à toutes nos lâchetés et à tous nos renoncements.
Dans ces mots qui s’entrechoquent, on plonge dans les fracas d’une guerre abominable qui nous interrogera pendant de longues années encore.
Froid et placide, Said Oussad, n’exprime au fond aucune révolte, mais une amertume qui nous reste au travers de la gorge et nous interroge, grâce à un style épuré et froidement factuel, sur ce que nous sommes devenus aujourd’hui. « Faut-il se taire et détourner le regard pour oublier cette impression d’impuissance qui vous prend à la gorge et la serre un peu plus fort à la vue de ce flot de sang et de ces fleuves de larmes qui se déversent dans les rues dévastées de notre inutile conscience ?… » Des mots d’une intensité telle qu’il nous est difficile de voir notre lâcheté dans nos miroirs cassés par tant de renoncements et de défaites.
Les chroniques interrogent, mais font aussi le bilan d’un renoncement collectif d’une nation qui perd ses repères et dont les dirigeants préfèrent voir ailleurs et ne pensent qu’à leurs étroits intérêts pour sauver des trônes et des fauteuils qui ne tiennent que par le bon vouloir des Américains et autres puissances. Dans ses chroniques, l’auteur fait en sorte que nous nous regardions en face sans fards et avec une conscience qui nous fuit encore plus à chacune de nos lâchetés et renoncements.
Le dernier ouvrage de Saïd Oussad est en réalité une plongée triste et amère au plus profond d’une Oumma qui ne cesse de se renier et qui contemple placidement et lâchement sa descente infernale vers l’abîme et le renoncement. Ces chroniques ne sont en fait que le miroir de ce que nous sommes devenus avec tous nos drames et nos multiples nekba. C’est aussi le témoignage direct d’une histoire arabe qui ne vit plus que sur les ruines d’un passé glorieux, et qui a abandonné la plus sacrée de ses causes, en livrant tout un peuple au plus terrible des drames de ce début de siècle.


Ghaza de Saïd Oussad , 215 pages
Éditions Dar El-Qods Al-Arabi


A.Blidi

 

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