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Les déchets des essais nucléaires dans le Sud du pays n’ont pas été traités:
La France accusée de manquer de volonté politique

Pour l’Histoire, il faut savoir que le premier essai a été effectué à Reggane, avec une puissance variant entre 60.000 et 70.000 tonnes de TNT explosive, ce qui équivaut à une bombe cinq fois plus puissante que celle lancée sur Hiroshima, selon des experts.

La gestion des déchets radioactifs, conséquence des essais nucléaires de l’armée française et laissés par la France en Algérie, ne relève pas d’une difficulté technique, mais d’un déficit de volonté politique de Paris. Cette sentence est du directeur de l’Observatoire des armements en France, Patrice Bouveret. Affirmant que la chose est tout à fait réalisable, il a recommandé le «rapatriement» et le «traitement en France des déchets radioactifs’’. Pour M. Bouveret, «il faudrait déjà lancer une mission pour nettoyer les sites contaminés et collecter les restes. Il faut bien évidemment affecter des moyens pour cela et, ensuite les déchets nucléaires du Sahara devraient être rapatriés en France et traités dans des sites nucléaires». Ce qui n’a jamais été envisagé par les autorités politiques françaises. Dans l’entretien qu’il a accordé au journal Libération, le directeur de l’Observatoire des armements en France affirme avoir réalisé un dossier complet à ces essais nucléaires. C’est dire que scientifiquement et techniquement, tout a été fait. Il reste la décision politique qui ne vient toujours pas.
Ce jeudi, il a été question de ce dossier lors d’un entretien entre les deux chefs d’état-majors des armées algérienne et française, Saïd Chanegriha et François Lecointre. A cette occasion, le général de Corps d’Armée algérien a évoqué «la problématique liée à la réhabilitation des deux anciens sites d’essais nucléaires français, à Reggane et In-Ikker». C’est dire que la demande a été clairement formulée à partir d’Alger. «Je tiens à évoquer la problématique des négociations, au sein du Groupe algéro-français, au sujet des anciens sites d’essais nucléaires et des autres essais au Sahara algérien, où nous attendons votre soutien, lors de la 17ème session du groupe mixte algéro-français, prévue en mai 2021, pour la prise en charge définitive des opérations de réhabilitation des sites de Reggane et In Ekker, ainsi que votre assistance pour nous fournir les cartes topographiques permettant la localisation des zones d’enfouissement, non découvertes à ce jour, des déchets contaminés, radioactifs ou chimiques», a souligné le général de Corps d’Armée à son interlocuteur français.
Il reste quoi pour passer à l’acte ? M. Bouveret insiste sur la mauvaise volonté politique française et beaucoup d’observateurs ont tendance à appuyer cette thèse.
Pour l’Histoire, il faut savoir que le premier essai a été effectué à Reggane, avec une puissance variant entre 60.000 et 70.000 tonnes de TNT explosive, ce qui équivaut à une bombe cinq fois plus puissante que celle lancée sur Hiroshima, selon des experts. Aujourd’hui, non seulement les sites radioactifs n’ont pas été décontaminés, mais les effets des radiations demeurent toujours dévastateurs et tragiques. Et pour cause, les déchets métalliques hautement radioactifs, comme les bidons, les fûts et autres objets laissés par le colonisateur ont été utilisés par les populations, notamment les nomades, ce qui constitue un réel danger pour ces habitants.
Le témoignage de l’oncologue Pr Kamel Bouzid du Centre Pierre et Marie-Curie d’Alger est édifiant. Il avait déjà révélé que les essais nucléaires français ont provoqué pour certains des fuites radioactives ayant atteint la Tanzanie (Afrique de l’Est) et la Côte-d’Ivoire (Afrique de l’Ouest), provoquant la mort de plusieurs habitants de ces régions ainsi que de soldats français. «Les effets radioactifs engendrés continuent et continueront encore de causer des cancers, des handicaps et la stérilité», a affirmé Pr Bouzid, exigeant que «la France nettoie ces sites comme l’avait fait la Russie à Tchernobyl en 1986 et le Japon à Fukushima en 2011». En février dernier, la France a été rattrapée par ces essais nucléaires, après avoir été touchée par le sable du Sahara algérien, contenant des particules radioactives portées par des vents, selon un spécialiste français de la radioprotection.
Yahia Bourit

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