Des vidéo, largement partagées, montraient les forces de sécurité marocaines en train de tabasser des migrants, et d’autres des affrontements violents entre les deux parties. Des scènes choquantes qui ont provoqué émoi et consternation à travers le monde.
Trois jours après la tuerie perpétré par la police marocaine qui a fait 23 morts parmi les migrants subsahariens dans la région de Nador à la frontière avec l’enclave espagnole de Melilla, les réactions au plus haut niveau de l’Union européenne et de l’Union africaine sont venues, hier, mettre le régime marocain face à ses responsabilité en matière de Droits de l’homme. Toutes les voix officielles, qui se sont exprimées sur le sujet, ont souligné l’usage disproportionné de la force par les forces marocaines de répression. Associé à cette dénonciation, l’UE et l’UA réclament à l’unisson une enquête indépendante pour faire la lumière sur la tuerie. Ces demandes d’enquêtes sont justifiées par l’ampleur du drame, dévoilé par de nombreuses vidéos et images très largement partagées sur les réseaux sociaux. On y voit des dizaines de migrants au sol, quasiment inertes. Certaines montraient également les forces de sécurité marocaines en train de tabasser des migrants et d’autres, des affrontements violents entre les deux parties. Des scènes choquantes qui ont provoqué émoi et consternation à travers le monde et soulevé l’indignation au Maroc, en Espagne et ailleurs.
Se disant «choqué» et «préoccupé», le président de la Commission de l’Union africaine (UA), Moussa Faki Mahamat, a dénoncé «le traitement violent et dégradant de migrants africains» que leur ont réservé les forces de sécurité marocaines. «J’appelle à une enquête immédiate sur la question et rappelle à tous les pays leurs obligations en vertu du droit international de traiter tous les migrants avec dignité et de donner la priorité à leur sécurité et à leurs droits humains, tout en s’abstenant de recourir à une force excessive», a-t-il ajouté dans un communiqué publié sur le site de l’UA.
De son côté, la commissaire européenne aux Affaires intérieures, Ylva Johansson, a estimé que les évènements de vendredi étaient, selon elle, «profondément troublant». Pour Mme Johansson. «Ces évènements sont profondément troublants en raison des pertes en vies humaines (…)», a-t-elle écrit dimanche sur son compte Twitter. Et de poursuivre : «Cette tragédie souligne pourquoi nous avons besoin de voies sûres, réalistes et à long terme qui réduisent les tentatives d’immigration irrégulière».
Par ailleurs, moult appels ont été lancés samedi en Espagne, au Maroc et ailleurs, pour réclamer «une enquête indépendante» sur cette tragédie. «Nous appelons à l’ouverture d’une enquête rapide et transparente», a déclaré aux médias, Mohamed Amine Abidar, le président de la section de l’Association marocaine des droits de l’Homme (AMDH) à Nador. De son côté, l’ONG espagnole Caminando Fronteras, spécialiste des migrations entre l’Afrique et l’Espagne, a exigé «l’ouverture immédiate d’une enquête judiciaire indépendante du côté marocain comme espagnol, ainsi qu’au niveau international pour faire toute la lumière sur ce drame humain».
Pour sa part, Eduardo de Castro, le président (maire) de Melilla et plus haute autorité politique de cette ville autonome, a dénoncé une «réponse disproportionnée» du Maroc à la tentative de passage des migrants. «Le Maroc se permet certaines choses qui ne seraient pas acceptables» en Espagne, a-t-il déploré. Situées sur la côte nord du Maroc, Melilla et l’autre enclave espagnole de Ceuta sont les seules frontières terrestres de l’Union européenne (UE) sur le continent africain et font régulièrement l’objet de tentatives d’entrée de la part de migrants cherchant à rejoindre l’Europe.
Le bilan de 23 morts est le plus meurtrier jamais enregistré lors des nombreuses tentatives de migrants subsahariens d’entrer à Melilla et Ceuta.
Yahia Bourit