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Aïn El Turck:
Les déboires des commerçants face au confinement

Sans omettre de saluer la décision des autorités sanitaires, en la jugeant juste et incontournable, promulguée à titre temporaire pour tenter d’éradiquer définitivement l’épidémie du coronavirus, nombre de gérants d’établissements de commerce de la municipalité d’Aïn El Turck n’ont pas omis de mettre en exergue l’éprouvante conjoncture à laquelle ils font face.

«Au moment où nous commencions à sortir la tête de l’eau, après plusieurs mois de galère, les nouvelles mesures du ré-confinement ont stoppé l’élan de nos activités, qui battaient déjà de l’aile. Nous nous considérons comme étant sacrifiés sur l’autel du Covid-19 » ont fait remarquer avec une humeur bilieuse des restaurateurs de ladite municipalité, réputée pour son animation nocturne avec ses différents établissements commerciaux achalandés, qui ne baissent leurs rideaux qu’à une heure tardive de la soirée, tandis que certains demeurent ouverts H24. Avec le confinement, la plupart des gérants desdits établissements de commerces ont d’ores et déjà réduit au maximum leur personnel, tandis que d’autres ont carrément donné des congés à leurs employés. Une équation redoutable. Sur ce volet sensible, des tributaires de l’emploi précaires, ont également exprimé leur scepticisme, en soulignant « leur crainte d’un probable maintien dans la durée du confinement, synonyme d’énormes pertes et autant de fracas ».
Du coup les restaurants, les pizzérias, les cafés, les hôtels et les petits commerces se sont encastrés brusquement dans le mur bornant l’impasse.
« A quelque chose malheur est bon » ont fait remarquer avec amertume nos interlocuteurs. Il importe de noter aussi que la crise sanitaire a également décuplé les affres de l’indigence chez les tributaires de l’emploi précaire du chef-lieu, à l’instar des trois autres municipalités de la daïra d’Aïn El Turck. Cependant, selon les témoignages glanés, les mesures édictées du re-confinement confrontent fort malheureusement nombre de dépendants d’emplois aléatoires, qui sont à deux doigts d’atteindre le seuil de la débine, à un dilemme insoluble. Plusieurs courent de grands risques en travaillant dans des lieux très fréquentés, où la distanciation sociale est difficile voire impossible à respecter comme entre autres dans le sordide marché communal d’Aïn El Turck.
« Nous souhaitons nous aussi avoir les moyens de nous protéger du virus… tout en assurant notre survie et celle de nos proches et en évitant une péroraison délétère en queue de poisson » ont fait remarquer des marchands d’un ton laborieusement sarcastique.
«En temps normal, les gens bricolent comme ils peuvent pour survivre. Mais il suffit d’un tremblement pour que tout s’effondre et que les revenus s’évaporent. Le coronavirus n’a pas inventé la précarité, mais il l’a grandement accrue » a commenté avec une pointe de dépit, non dissimulée, un père de famille, revendeur ambulant de fruits et légumes, avant de renchérir « de nombreuses familles vont encore manger beaucoup de pain rassis, tous les emplois ne vont pas reprendre de sitôt. Les pauvres n’ont aucune réserve pour faire face à une crise, qui a tendance à durer encore ».
Selon les témoignages recueillis auprès des farouches défenseurs de l’informel installés dans le chef-lieu, qui se débattent dans la versatilité des lendemains, les frais d’alimentation, le loyer et les charges sont devenues insurmontables en cette période de crise sanitaire.
« Nous faisons appel à la débrouille, une équation aux milles inconnues, qui multiplie l’incertitude dans laquelle nous tentons de subsister à ce chômage forcé. Si nous nous ne lavons pas les mains régulièrement, c’est tout bonnement faute d’avoir régulièrement l’eau courante à la maison » ont ironisé des revendeurs à la sauvette du marché aux puces, jouxtant l’ex-souk el fellah d’Aïn El Turck. Les mesures du confinement majorées avec la lutte contre le phénomène des traversées clandestines menées sans relâche par les différents corps de sécurité, ont également freiné la pratique de la pêche artisanale dans la contrée d’Aïn El Turck.
En effet, en temps normal c’est généralement après le crépuscule, que des grappes de jeunes et moins jeunes pêcheurs à la ligne font apparition sur les récifs et autres rochers essaimés sur les rivages des plages, qui jalonnent cette côte. Ils ne quittent les lieux que quelques instants avant les premières lueurs de l’aube. Chacun d’entre eux à son endroit de prédilection favori. Ces deux dernières années, le quai d’accostage de Cap Falcon était aussi le lieu le plus fréquenté par les férus de la pêche à la ligne. Cependant avec l’interdiction de circuler à partir de 22h, ces pêcheurs se retrouvent subitement le bec dans l’eau.
« Nous ne pouvons plus lever l’ancre, nos embarcations demeurent hélas bloquées avec cette crise sanitaire et les agissements frauduleux des réseaux de l’émigration clandestine. Nous avons l’habitude de pêcher après le crépuscule en exploitant souvent la pleine lune et ce, pour piéger une diversité d’espèces de poissons dans nos rets, qui abonde la nuit à une profondeur moindre par rapport au jour, en cette période de l’année » ont commenté avec amertume des pêcheurs de la municipalité d’Aïn El Turck, qui ont l’habitude d’exposer à la vente le lendemain matin leurs prises encore fraîches sur des tréteaux de fortune au niveau de différents endroits des communes d’Aïn El Turck, de Bousfer et d’El Ançor.
Rachid Boutlélis

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