Qui, d’entre nous, ne s’est-il pas arrêté un instant devant une devanture de magasin
de consommation ou de services pour constater, les yeux écarquillés, le flot de fautes d’orthographes transcrites sur l’enseigne commerciale ? Le phénomène, semble s’être si fortement banalisé, qu’au plus, on pouffe sous le nez et l’on continue son chemin.
Ailleurs, la tolérance à la gabegie littéraire et le contenu rédactionnel d’une enseigne commerciale, et cela est valable tant pour les sites numériques que pour les locaux commerciaux, font l’objet de sérieuses études de la part des spécialistes du marketing et de la communication.
En 2011, l’entrepreneur britannique Charles Duncombe lançait un pavé dans la mare de l’orthographe : des fautes sur un site internet feraient perdre chaque année des millions de livres aux entreprises. Cette révélation apocalyptique, reprise par la très sérieuse BBC, a depuis fait le tour du monde. Mais, me diriez-vous, on n’en est pas encore là. Il n’empêche pas que, l’incurie linguistique, qui caractérise la majorité des enseignes commerciales de la ville d’Oran, fait honte à sa réputation. Les erreurs monumentales, telles que « traveaux » ou lieu de « travaux », « Alimantacion general » au lieu de « Alimentation générale », « « Redeux electric » au lieu de « rideaux électriques », « micanicien » au lieu de « mécanicien », « ilictriciti auto » au lieu de « électricité auto », au delà de l’indignation qu’elles provoquent, elles n’empêchent l’hilarité du lecteur et certainement la curiosité du passager surtout s’il est étranger au pays. Peut-être qu’actuellement, notre souci premier n’est pas focalisé sur ce phénomène de transcription, toutefois qu’est-ce qui interdirait aux responsables locaux de la ville d’Oran de constituer une commission spéciale qui prendrait en charge ce volet à même de faire corriger ces inepties, devenues malheureusement, nombreuses et criardes ? Comme cité dans la conclusion de l’entrepreneur britannique Charles Duncombe, même si les conséquences ne sont pas aussi fâcheuses qu’on veut bien le faire croire, mieux vaut éviter de massacrer les accords, démantibuler la concordance des temps ou mutiler les participes passés.
Son autre conclusion est tout aussi vraie : lorsqu’une faute d’orthographe se glisse sur une enseigne et troque involontairement un « I » pour un « A » (vente d’un Aphone au lieu d’un Iphone, par exemple), une suspicion légitime peut s’installer, la confiance d’un acheteur potentiel peut s’éroder facilement.
Ceci étant dit, et sans verser dans l’équivoque selon laquelle, les fautes d’orthographe font perdre beaucoup d’argent aux entreprises, selon une révélation faite il y a quelques années, il s’agit tout simplement d’atténuer une frustration d’une population oranaise qui ne s’est jamais accoutumée à voir cette étourderie linguistique, en délicatesse avec la syntaxe et en brouille avec le vocabulaire, qui incommode, faut le dire, et le regard et l’esprit. Et il en va pour le français comme pour l’arabe.
Karim Bennacef