Cette issue de la rencontre de Viennes, inattendue par son ampleur, inaugure le retour des réunions en présentiel et confirme la perte d’influence des Etats Unis auprès de l’Arabie Saoudite, l’un des poids lourds de l’Opep+, avec la Russie.
Réunis, hier, à Vienne, les pays membres de l’Opep+ ont pris la décision qui consiste en la réduction de la production de pétrole de 2 millions de barils par jour. Cette baisse drastique est véritablement historique, compte tenu du contexte géopolitique du moment et la crise énergétique qui sévit en Europe. Cette posture protectionniste d’un marché pétrolier assez fragile, faut-il le souligner, impacte négativement les pays occidentaux, dont les populations craignent un hiver problématique. Le signal envoyé par les pays producteurs de l’or noir est on ne peut plus clair et signifie la primauté de leur intérêt sur ceux de l’Occident qui visiblement aura à gérer une situation inflationniste sans précédent depuis la fin de la 2e guerre mondiale.
Cette issue de la rencontre de Vienne, inattendue par son ampleur, inaugure le retour des réunions en présentiel et confirme la perte d’influence des Etats Unis auprès de l’Arabie Saoudite, l’un des poids lourds de l’Opep+, avec la Russie. Les agences d’information qui ont rapporté la nouvelle en milieu d’après-midi y croyaient à peine. Ainsi, l’on retient une coupe draconienne de production, citant un membre de la délégation iranienne, affirmant que cette décision avait pour objectif de soutenir des prix affectés par les craintes de récession.
Les représentants des treize membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) et leurs dix alliés ont convenu d’une baisse de «deux millions» de barils par jour pour le mois de novembre, a déclaré à la sortie de la rencontre Amir Hossein Zamaninia, représentant de l’Iran au sein du cartel. Une annonce, confirmée depuis, a fait l’effet d’une bombe dans les milieux énergétiques à l’échelle de la planète.
Pourtant avant le début de la réunion, les pressions occidentales se faisaient à peine discrètes et l’on déclarait dans certains salons qu’une baisse d’un million de barils /jours «pousserait les cours de nouveau au-delà de 100 dollars le baril». Craig Erlam qui rapporte cet avertissement n’imaginait pas que l’Opep+ allait doubler la mise. « juste au moment où les consommateurs poussaient un soupir de soulagement», les prix à la pompe ayant fortement reculé depuis cet été. Les deux références mondiales du brut ont perdu du terrain ces dernières semaines, évoluant autour de 90 dollars le baril, bien loin des sommets enregistrés en mars au début de la guerre en Ukraine (près de 140 dollars).
Il est entendu que cette barre des 140 dollars pourrait être dépassée et l’on parle déjà d’une réaction d’humeur de la Maison Blanche qui, à l’approche des élections de mi-mandat du mois prochain, est dans les plus mauvaises des positions. En effet, Le président américain Joe Biden s’échine depuis des mois à tenter d’endiguer l’envolée des prix qui érode le pouvoir d’achat des ménages, allant même jusqu’à se rendre à Ryad en juillet lors d’une visite très controversée.
D’ailleurs, interrogé à son arrivée sur la réaction à attendre de Washington, le ministre émirati de l’Energie, Souhail ben Mohammed Al-Mazrouei, a botté en touche, affirmant qu’il s’agissait d’une «organisation technique» ne se mêlant pas d’enjeux politiques.
Le prince saoudien Abdel Aziz ben Salmane s’est refusé à toute déclaration sur le fond, préférant parler météo, tandis que le vice-Premier ministre russe chargé des questions énergétiques, Alexandre Novak, n’a pas eu un mot pour la presse.
Il faut dire que cette baisse historique des volumes de brut arrange Moscou, «et pourrait donc être perçue comme une nouvelle escalade des tensions géopolitiques», commente Ipek Ozkardeskaya, analyste de Swissquote.
Anissa Mesdouf