Le «Grand Hôtel» de retour… après dix ans d’oubli et d’abandon
Après quatre années de travaux de restauration et de réhabilitation, le célèbre et plus ancien établissement hôtelier d’Oran sera de nouveau ouvert au public à partir du mois de février prochain. Le wali d’Oran, en poste depuis à peine un mois, n’a pas manqué de visiter le chantier en cours de finition de cet hôtel emblématique de la ville, un bijou architectural inscrit dans la mémoire oranaise et qui a failli disparaître du paysage urbain.
Situé sur la place du Maghreb au centre-ville, le Grand Hôtel est un établissement de 88 chambres et 8 suites, très peu connu des plus jeunes oranais, tant il a subi les affres de la décrépitude et de l’abandon durant l’ancienne période de gestion calamiteuse du patrimoine urbain. On sait pourtant que cet établissement faisait la fierté de la ville tant il a connu le passage de nombreuses anciennes célébrités du monde artistique, politique et sportif, comme le général de Gaulle, la célèbre chanteuse Edith Piaf, le boxeur français Marcel Cerdan ou plus récemment le président défunt Bouteflika lors de sa campagne pour le premier mandat aux élections présidentielles.
Durant les années 60 et 70, le grand Hôtel avait abrité d’importantes rencontres d’élites universitaires locales ayant abouti à la création d’organisations syndicales et associatives. La dernière en date a été la naissance en ce lieu de la fondation Emir Abdelkader.
Cédé en concession à un opérateur privé, le Grand Hôtel n’a pas réussi à survivre aux contestations et aux revendications des travailleurs voulant être associés au capital financier de l’entreprise hôtelière. Fermé en juillet 2010 par décision administrative pour «non renouvellement de l’autorisation d’exploitation», l’hôtel livré à l’abandon a plongé dans la dégradation et l’effritement avancé des murs, des plafonds et des revêtements. Même la belle entrée en marbre de l’établissement a été quelque temps squattée par des sans-abris dans des conditions scandaleuses de saleté et de clochardisation.
Totalement marginalisé et oublié durant plus de dix ans, le Grand Hôtel illustre à lui seul les défaillances, les carences et les renoncements de l’ancien mode de gestion et de prise en charge des sites, édifices et monuments historiques et architecturaux de la capitale oranaise. À l’image du siège de la grande mairie aux deux lions, fermé depuis plus d’une décennie, pour les mêmes raisons de dégradation avancée de l’intérieur du bâtiment.
Le Grand Hôtel, enfin repris en charge en 2020, a bénéficié d’un projet de restauration et de rénovation qui lui permettra de retrouver sa splendeur et ses couleurs. En visitant le site, le wali d’Oran a mis l’accent sur «le parachèvement des dernières retouches dans les travaux de réhabilitation» notamment «l’accélération de la mise en place des mobiliers et équipements afin de procéder à l’ouverture de l’hôtel avant la fin du mois de février». Inchallah, lancent les mauvaises langues locales ravies et soulagées par le sauvetage de cette infrastructure touristique à haute valeur historique et mémorielle.
Mais beaucoup cependant se sont empressés de pointer du doigt d’autres vieilles structures hôtelières laissées à l’abandon, dont la tour-carcasse dite de l’hôtel du Châteauneuf qui nargue le regard des visiteurs depuis presque un demi-siècle, et l’hôtel dit «Hayat Regency» à El Barki, abandonné à la dégradation depuis des années suite à un scandaleux litige financier entre le promoteur privé et une banque d’Etat…
Par S.Benali