Les mots vous manquent quand s’offre à vos yeux un paysage d’une beauté sans nulle autre pareille. Quand vous découvrez le les impressionnants endroits que recèle Djanet et leur splendeur, vous avez l’impression, l’espace d’un instant, que vous n’est plus sur cette terre que vous avez connue jusque là.
Les citadins que nous sommes, avons pris du temps pour saisir qu’il puisse y avoir des espaces aussi grands et aussi beaux sur cette terre. Ce qui s’offrait à nos yeux, avec ses couleurs et ses infinis, nous donnait cette impression d’une renaissance.Et puis nous est venu à l’esprit cette fameuse tirade « voir Venise et mourir », mais qu’elle paraissait légère face à « voir Djanet et mourir ». Au delà du seul paysage, c’est l’histoire de cette région qui vous emmène dans des temps aussi vieux que l’humanité. Des civilisations entières, fortes riches et organisées ont vécu, hier, ici. Les vestiges et les dessins vous parlent de ces temps glorieux où ces civilisations grandioses dominaient cette partie du Sahara algérien. C’est en fait un extraordinaire voyage dans le temps. Le rêve et l’histoire vous saisissent face à cette splendeur qui s’étend à l’infini.
Oui notre Algérie est belle et envoûtante, mais malheureusement nous ne la connaissons pas assez. Nous passons à coté de trésors inestimables que nous ofre la nature. Et ceci nous amène à poser des questions de fond sur l’état du tourisme dans notre pays, car il est franchement inacceptable que des régions aussi belles aussi historiques ne puissent pas être connues et partagées par les Algériens d’abord, mais aussi par tous les habitants de cette terre.
Dans cette virée au Sud, nous avons eu l’occasion de discuter avec des professionnels du tourisme de la région qui sont convaincus que si tous les moyens sont mis en place, l’Algérie sera l’une des destinations phares du tourisme mondial. Elle en a grandement les capacités et ces régions de par leur beauté, leur exotisme, leur histoire et leur secret enjoliveur séduiront des millions de personnes.
Ainsi pour Ahmed responsable de l’Agence « Admir » à Djanet depuis 20 ans et grand connaisseur des trésors de cette région, il suffit de quelques ajustements pour réaliser ce qu’il qualifie de révolution touristique dans ces endroits féeriques. Son diagnostique est édifiant à plus d’un titre.
« Nous sommes dans ce secteur du tourisme depuis un long moment. Nous avons une expérience de plus de 20 ans dans le domaine. Notre tourisme a connu des problèmes auparavant, notamment avec la décennie rouge qu’a connue notre pays dans les années 90. Une période qui a été pour nous encore plus difficile que cette pandémie du coronavirus. Il faut savoir que pendant cette douloureuse période du terrorisme dans les années 90, l’Etat nous a toujours laissé soumis aux impôts. Pour ce, nous demandons à l’état de nous régler ce dilemme des impôts qui nous asphyxie. Notre deuxième problème concerne les véhicules. Nous travaillons avec des véhicules très anciens, avec tous les désagréments que cela suppose pour nous et pour touristes. Souvent nous devons recourir à la location de 4×4, ce qui nous pompe beaucoup d’argent. Ainsi nous demandons au gouvernement de nous aider au minimum sur ces deux points que sont les impôts et les véhicules. Nous sommes convaincus aujourd’hui que le salut de l’Algérie ne peut venir, dans l’avenir, que d’un tourisme fort et rentable, car notre dépendance aux hydrocarbures doit cesser. Le tourisme sera la locomotive du développement dans notre pays. Nous, les enfants de cette région et professionnels nous sommes prêt à faire la révolution touristique comme nos frères de Oued Souf ont fait leur révolution agricole ». Ahmed, en vrai connaisseur parle avec passion de son métier et croit qu’il faut faire plus d’efforts dans ce secteur névralgique grandement rentable pour l’économie nationale. Et dans le même ordre d’idées, il soulève aussi d’autres points qui doivent être revu ou pris en charge. Il aborde ainsi un autre volet qui ne manque pas d’intérêt, « nous tenons à saluer la dernière décision d’Air Algérie de réduire de moitié les prix du billet vers le Sud, mais nous estimons qu’il ne faut pas plafonner les choses à plus de dix personnes comme c’est le cas aujourd’hui, mais de le descendre à moins encore, surtout quand on sait que parfois les familles sont composées de quatre personnes. D’autre part, nous voudrions qu’il y ait des vols directs à partir de Constantine et d’Oran et ne pas se contenter du seul aéroport d’Alger. Comme nous souhaitons qu’il y ait plus de souplesse dans l’octroi des visas, car souvent et à cause d’un quota de personnes , ces visas ne sont pas données, ce qui cause de grands préjudices aux agences activant dans notre région. ». Des propositions qui ne manquent pas de bon sens et de lucidité pour faire bouger les choses et amorcer un réel et effectif décollage du tourisme dans notre pays. Lui succédant, Sid Ahmed de la ville Tamanrasset soulève lui aussi d’autres difficultés qui entravent le bon fonctionnement des agences touristiques de cette région de l’extrême sud du pays. Il dira en substance que « depuis 2010, il n’existe plus de tourisme à Tamanrasset, alors que plusieurs touristes veulent venir visiter notre région. Nous sommes les enfants de Tamanrasset et nous connaissons le moindre de ses endroits. Nous voulons que lorsque le touriste vient dans notre région, il sente qu’il est pris en charge par les enfants de la région qui peuvent répondre à toutes ses attentes. Le Hoggar Tassili est une région prisée par beaucoup d’étrangers et nous pensons qu’il faut faire quelque chose en ce sens pour relancer le tourisme dans notre région. Nous voulons que lorsque le touriste arrive à Tamanrasset, il se sente comme chez lui, et ressent qu’il ne vient pas que pour la ville, mais aussi pour connaître les Touaregs de Tamanrasset qui sauront l’accueillir et lui feront ressentir que ce n’est pas là qu’une question d’argent, mais que nous serons à l’écoute de sa moindre doléance». L’autre professionnel que nous avons approché lors de notre séjour est Mohamed Zahouani, notre chef cuisinier qui nous a accompagnes tout au long de notre séjour , et qui lui aussi a tenu à soulever certaines contraintes auxquelles il fait face, « Je veux dire aux chefs d’agences qu’il faut faire un plus dans le coté cuisine, comme lors des bivouacs, où il faut limiter les déplacements et rester un peu plus, deux ou trois jours, dans un seul endroit pour permettre aux visiteurs de profiter plus de chaque moment et de chaque paysage, comme ils doivent communiquer plus avec les responsables de la restauration pour donner les meilleurs services aux touristes qui viennent visiter notre région ».
Lors de ce séjour dans ces lieux paradisiaques, nous étions accompagnés par deux jeunes femmes françaises qui ont, elles aussi, bien voulu se confier à nous pour nous décrire leur joie et leur émerveillement face à ces sites naturels d’une rare beauté. Ainsi Camille de Paris nous dira « que ce qui est frappant quand on arrive pour la première fois à Djanet, c’est surtout la façon avec laquelle on est accueilli par les gens de la région. On a aussi cette impression d’être coupé du monde et de notre quotidien de tous les jours. On se retrouve dans des paysages très différents de ce qu’on a l’habitude de voir et d’être en face d’une immensité qui donne le vertige et qui est à la fois apaisante. Ce qui est aussi marquant c’est cette relation que l’on peut avoir avec les guides et les personnes qui nous emmènent à travers leur pays, leur région et qui nous font découvrir leur quotidien. C’est vraiment un moment de partage qui est très fort. Et qui est très marquant par la suite quand on retourne chez soi et qu’on garde tous ces merveilleux souvenirs. Par ailleurs je veux souligner qu’il n’ y a pas de difficultés particulière pour les étrangers qui veulent venir, car les agences font tout le travail, que ce soit les agences locales ou celles se trouvant à Alger ou Oran qui font toutes les démarches administratives ou autres. Ensuite une fois ici ce n’est que du bonheur ». Par la suite c’est une autre française, Sophie originaire de Montpellier qui a, elle aussi, tenu à apporter son témoigne sur ce séjour. « Je n’ai pas beaucoup de choses à ajouter par rapport à ce qu’a dit ma compatriote avec laquelle je suis tout à fait d’accord. Même si pour moi, il y a une petite différence puisque je viens directement de France, alors qu’elle habite à Alger. J’ai vécu des moments magiques, et c’est peut être là l’un des meilleurs voyages que j’ai fait de toute ma vie. J’en garderai beaucoup de choses au plus profond de moi pendant un long moment. En un temps très court j’ai beaucoup changé et beaucoup appris. Et j’ai envie d’en parler dès mon retour en France. Je n’ai pas tout suivi du débat auparavant à cause de la langue, mais je tiens à dire que contrairement à ce qu’on croit en France quand on dit qu’on va au Sahara algérien à cause d’un supposé danger qui en réalité n’existe aucunement, j’ai envie de leur dire qu’il faut y aller car l’expérience est unique et qu’on en sort grandi ». Notre dernière interlocutrice est une jeune femme d’Oran qui a exprimé sa grande joie de se retrouver dans cette région de Djanet qu’elle a trouvé magique, ajoutant, « mon seul regret est qu’il n’y ait pas un vol direct d’Oran vers cette région. Nous sommes obligés d’aller à Alger et de refaire le même circuit au retour, alors que nous avons un grand aéroport à Es-Senia et on pourrait au moins programmer un vol par semaine. C’est dommage de priver les Algériens de la découverte de leur beau pays et d’endroits aussi beau que celui où nous sommes aujourd’hui », regrette Wafa.
Tout au long de notre séjour, notre groupe était sous l’ivresse de la beauté de ces lieux que nous avons visité depuis Taghen, ou Tikoubaouen, Ihrir, Tifartssen. Des endroits qui accompagneront et hanteront agréablement nos souvenirs pendant un bien long moment.
Abdelkader.B