La FAO identifie pas moins de 26 pays, principalement en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie, qui dépendent à plus de 50 % de ces deux pays pour leurs importations de blé. L’équation n’est donc pas difficile à élucider. 50 % c’est énorme et aucun pays au monde ne saurait se substituer à l’Ukraine et à la Russie pour fournir ses 26 pays.
L’Organisation des Nations unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO) affiche une grande inquiétude en rapport avec l’un des impacts directs de la guerre qui sévit en Ukraine. Son dernier rapport fait état d’un nombre impressionnant d’êtres humains qui subiront les effets du conflit, à travers une famine, jamais encore enregistrée dans l’histoire moderne. En effet, l’organisation onusienne estime qu’en plus des populations déjà touchées par la sous-alimentation en Afrique et en Asie, quelques 8 millions à 13 millions de personnes supplémentaires sont directement menacées par la faim. La FAO qui impute cette dégradation sans précédent de l’état de l’alimentation dans le monde à la guerre en Ukraine, pointe l’Asie-Pacifique, l’Afrique subsaharienne, le Proche-Orient et l’Afrique du Nord, comme autant de régions en premières lignes pour subir les conséquences de la guerre. Les autorités russes, qui admettent les prévisions catastrophiques de la FAO, promettent de livrer du blé aux pays africains à des prix abordables. Mais cette assurance n’est pas pour apaiser la crainte grandissante des responsables de la FAO qui, dans leurs travaux publiés avant-hier, n’affichent pas le même optimisme bien au contraire. Partant d’un fait mondialement avéré qui place l’Ukraine et la Russie, comme faisant partie des principaux exportateurs de blé, de maïs, d’orge, de colza et de tournesol, représentant, à eux deux, plus d’un tiers des exportations mondiales de céréales, il est objectivement difficile d’imaginer une solution en cas d’enlisement de la guerre.
Dans le même rapport, la FAO identifie pas moins de 26 pays, principalement en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie, qui dépendent à plus de 50 % de ces deux pays pour leurs importations de blé. L’équation n’est donc pas difficile à élucider. 50 % c’est énorme et aucun pays au monde ne saurait se substituer à l’Ukraine et à la Russie pour fournir ses 26 pays. Pis, la situation sur le front ukrainien pousse les autres pays producteurs à stopper leurs exportations. Cela aggrave la situation de dépendance, dont souffre particulièrement le Liban, qui importe 80 % de son blé d’Ukraine et ne dispose que de quelques semaines de réserves de cette céréale. Ce pays du Moyen-Orient est un exemple parmi tant d’autres. Et bon nombre ne sont pas assez riches pour supporter la très forte hausse des prix du blé.
Selon que durera la guerre, la FAO craint que son indice des prix alimentaires, qui agrège les prix sur les marchés internationaux de plusieurs denrées de base (céréales, sucre, viande, produits laitiers…), connaisse une poussée inflationniste sans précédent. L’avenir immédiat est très inquiétant pour les 26 pays et même au-delà. La raison tient à un amoncellement de facteurs aggravant le risque d’une famine, encore jamais constatée. Actuellement, la faim dans le monde touche près d’une personne sur dix. Un tiers de la population est en insécurité alimentaire, sans accès régulier à une alimentation adéquate. Les conséquences de la guerre auront un effet de déclassement généralisé qui verra les plus fragiles payer les premiers la facture du conflit. Aucun pays n’est véritablement à l’abri semble dire le rapport de l’organisation onusienne. Pour cause, les famines provoquent des troubles et à l’échelle attendue par la FAO, l’ampleur de ces troubles déstabiliseront une bonne majorité des pays de la planète.
Ceci explique l’empressement des pays riches à trouver des alternatives comme «éviter tous les signaux et mesures restrictives qui limiteraient les exportations et entraîneraient de nouvelles hausses de prix», décidé lors d’une rencontre où ont pris part la FAO, le Programme alimentaire mondial (PAM) et l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Au même moment, à Versailles, le président français, Emmanuel Macron, concluait un sommet européen en appelant à se préparer à un risque sérieux sur le plan alimentaire.
Nadera Belkacemi