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VISITE DE MACRON, JM 2022, LA SANTÉ À ORAN, RETRAITÉS DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET INTRODUCTION DE L’ANGLAIS AU PRIMAIRE:
Le Professeur Boubekeur décortique l’actualité

Plusieurs événements ont caractérisé l’actualité nationale ces dernières semaines, dont la plus en vue, la toute récente visite du Président français Emmanuel Macron en Algérie, marquée par une escale dans la ville d’Oran. Le Pr Mohamed Boubekeur, sénateur d’Oran, ouvre une lucarne sur cette actualité : écoutons-le :

Ouest Tribune : Outre l’intérêt que suscite la visite du Président français, Emmanuel Macron, en Algérie dans le raffermissement des relations entre les deux pays, que retenez-vous, en tant que sénateur de la ville d’Oran, de son «escapade» à El Bahia ?

Pr Boubekeur : Il est vrai qu’il s’est agi d’une visite amicale et fort sympathique à la ville d’Oran . Le président français semblait très détendu, pour preuve, comme l’ont souligné certains cercles, il aurait enlevé son costume de président pour être tout simplement l’hôte d’un jour de la population oranaise vers laquelle il n’a pas hésité à se diriger et serrer les mains, sans protocole, que cela soit au niveau du siège de Disco Maghreb ou au Palais des Sports ou ailleurs. Il est vrai aussi que l’homme est simple, cordial et modeste et surtout très attentionné, avec un esprit vif. Pour preuve, le lendemain au Palais des Sports d’Oran où il a eu droit à une « battle » de Break Dance, le président français a reconnu très vite les membres de la partie algérienne, dont j’en faisais partie qu’il avait rencontrés la veille. Le corps diplomatique qui l’accompagnait, avec lequel nous avions échangé des discussions lors du dîner, semblait lui aussi, très à l’aise dans cette sortie oranaise.

Ouest Tribune : Des figures oranaises semblent quelque peu déçues du choix des lieux de visite …Vous partagez ?

Pr Boubekeur : En tant que sénateur et représentant de la ville d’Oran je partage, en grande partie, leur désappointement. Alors, je ne sais pas si le président français, du moins son protocole, a été bien ou mal informé sur le choix des lieux et sites à visiter, mais j’estime que, il aurait marqué une halte devant le monument du chahid Zabana située sur la place Tahtaha à Médina El Jadida, lieu de mémoire de référence d’Oran, il aurait marqué un grand coup et aurait même été chaleureusement applaudi par la population oranaise qui aurait apprécié le geste, comme cela a été le cas pour l’ancien président français, Jacques Chirac, qui avait rendu un vibrant hommage au martyr de la ville d’Oran. Je ne suis pas contre sa visite au siège de Disco Maghreb, ou sur la présence du journaliste Kamel Daoud, ou encore de la chanteuse Zahouania, ou aller visite l’ancien domicile de Yves Saint Laurent, mais moi, comme beaucoup d’Oranais, estimons que ces personnages et ces lieux ne représentent pas Oran, ils en font partie, même si Oran est la ville du Raï. On aurait prévu les deux options, personne n’aurait jasé, le satisfecit aurait été complet et suffisant et la population oranaise honorée, car Oran est avant tout une ville de martyrs. Elle a ses hommes, ses femmes et son histoire. Je regrette encore une fois de le dire, mais Oran, n’est pas Disco Maghreb. Il aurait été plus judicieux, pour dévoiler les aspects culturel et artistique de la ville d’Oran, de prévoir une rencontre dans une salle de cinéma ou autre, en invitant la ministre de la culture et des personnalités de la ville que nous reconnaissons, sans discrimination.

Ouest Tribune : Certains milieux français ( l’extrême droite notamment) ont été très critiques à l’égard du Président Emmanuel Macron, quand il s’est rendu au sanctuaire des martyrs à Alger. Que répondriez-vous ?

Pr Boubekeur : Malgré le tollé soulevé par divers cercles français, à l’instar de l’extrême droite ou encore d’une certaine intelligentsia, pour ne citer que ceux-là, le président français Emmanuel Macron a fait preuve d’un grand courage comme en atteste son premier geste, à savoir celui de prendre sa voiture et d’aller se recueillir sur la mémoire des martyrs pour leur rendre hommage.
Cela demande du courage et une conviction profonde. Il s’est rendu ensuite au cimetière chrétien et au cimetière juif, nul ne peut lui faire de reproches. Pour abonder dans le sens de votre commentaire et qualifier les choses, il est vrai que le Président Macron est venu avec des objectifs précis et pour être pragmatique. Il a été très explicite, « laissons l’histoire de côté ».

Ouest Tribune : Les choses étant ainsi précisées, comment évaluez -vous, la visite du président français en Algérie, quel niveau a pris le développement des discussions entre les deux pays ? Aussi, peut-on considérer que cette visite est le tremplin vers une relation vraiment refondée, qui va aboutir ?

Pr Boubekeur : La visite du président Emmanuel Macron en Algérie est une totale réussite. Je suis entièrement d’accord avec le président Abdelmadjid Tebboune quand il a dit que la visite a été réussie. Pour preuve, la délégation française était composée de pas moins de 90 membres, dont 07 ministres, des députés, et une armada d’opérateurs économiques et d’experts. Je pense que cette fois-ci elle portera ses fruits.
Il y a toujours des blocages, certes, mais ce qui est extraordinaire, c’est que pour la première fois, les échanges ont été faits à de multiples niveaux. Les ministres des deux parties se sont rencontrés entre eux. Et avec tous les protocoles qui ont été signés entre les différents ministères, je suis convaincu que cela portera ses fruits .
Je suis surtout convaincu que cette visite s’inscrit dans le principe gagnant-gagnant. D’ailleurs, le président algérien, Abdelmadjid Tebboune a, lors d’une discussion avec un général de l’armée française en présence d’une députée franco-algérienne, née à Skikda d’ailleurs, bien tenu à préciser que l’Algérie d’aujourd’hui une force, la première force africaine, lui rappelant au passage qu’au moment où notre pays était dans le chaos pendant les 10 années de la décennie noire, personne, ni aucun pays, n’a volé à son secours, et encore moins, la France. Par ailleurs, j’aurai en revanche souhaité que les échanges aient été élargis aux sénateurs et députés algérien et français.

Ouest Tribune : Inévitablement les questions économiques se sont taillées la part du lion lors des discussions entre les deux chefs d’Etat algérien et français ainsi qu’au niveau de leurs représentants diplomatiques. Peut-on savoir, la ligne directrice qui a été définie ?

Pr Boubekeur : Il est vrai que d’un point de vue économique, nous n’avions pas déployé le partenariat adéquat entre nos deux nations. Pour preuve, le volume des échanges économiques ne dépasse guère les quelques millions de dollars, alors que ceux entretenus par la France avec d’autres pays se comptent en milliards de dollars. Vous en convenez que c’est très faible, quand on sait que l’on peut obtenir énormément de choses. J’ai, lors d’une discussion avec Montebourg et Benguigui, pointé du doigt la question. Aujourd’hui, le président Abdelmadjid Tebboune a remis les choses dans leur contexte pour un équilibre équitable dans les relations et les échanges algéro-français. L’essentiel, c’est qu’aujourd’hui l’Algérie a relevé le défi, elle a dit oui, mais nous sommes pour un partenariat « gagnant-gagnant », un partenariat renouvelé « gagnant-gagnant », parce que l’Algérie est maintenant en position de force.
L’inflation augmente, les Etats Unis, la Grande Bretagne, souffrent de cette inflation avec des taux de 15, 20, voire même 50%. En France, il faut voir les prix des matières de tout ce qui est nécessité, comme l’alimentation, l’énergie, etc. L’année 2023, sera une année difficile. Ensuite, il y a le changement climatique qui va faire des désastres, les pluies torrentielles d’un côté, les incendies, la déglaciation, la remontée des eaux de l’autre et il faudra lutter contre tout cela.
Moi je dis qu’aujourd’hui, l’Algérie a une chance extraordinaire de surmonter tout ça, de diversifier ses ressources, pour amorcer le décollage économique. D’un point de vue économique, nous avons toutes les possibilités et potentialités nécessaires avec le gaz, le pétrole, les ressources halieutiques au côté de l’agriculture, des ressources qui ont été peu ou prou exploitées à l’instar du cuivre et de milliers d’autres gisements.

Ouest Tribune : Il a été décidé, entre les deux parties, l’Algérie et la France, l’institution d’une commission mixte pour l’écriture de la mémoire. Votre avis sur le sujet ….

Pr Boubekeur : Je tiens d’abord à souligner l’échec de la précédente commission Benjamin Stora- Chikhi. Pour moi, les actions qui ont été faites par le Président Emmanuel Macron sont à son initiative personnelle et cela est très courageux de sa part. Je cite le cas de la restitution des crânes des martyrs algériens à l’Etat algérien, c’est un geste très fort. Par ailleurs, personnellement, je ne crois pas à la nouvelle commission mixte, même si, comme l’a déclaré le président, elle sera typiquement, historique et qu’il n’y sera pas question de politique. Cet aspect de la chose étant dégagé, je confie tout de même qu’elle sera essentielle. Il y sera procédé à la relecture ou la réouverture des archives pour l’apaisement de la mémoire, sans aucune autre portée. J’en conviens. Toutefois, il est important de prendre en considération le passif afférent aux irradiations du site nucléaire en Algérie et effacer ses effets, la réparation des dégâts subis par les Algériens contaminés à Reggane et penser à leur indemnisation. C’est une question fondamentale, qui j’espère, saura trouver son aboutissement.

Ouest Tribune : Sur un tout autre sujet, l’Algérie, a accueilli, à Oran, en juillet dernier, la 19ème édition des Jeux méditerranéens. Des efforts herculéens ont été accomplis par l’Etat pour la tenue et la réussite de cet événement international. Quel est votre constat en tant que sénateur et l’un des représentants de la ville d’Oran?

Pr Boubekeur : Pour revenir à cette 19ème édition des jeux méditerranéens qu’a organisé, haut la main l’Algérie à Oran, cela a été un événement d’une grande importance pour notre pays et sa population et particulièrement celle d’Oran. Aujourd’hui, la ville d’Oran est sortie de l’anonymat et est connue mondialement, consécutivement à l’organisation de ces jeux.
Les installations qui ont été réalisées sont de haut niveau et sont dignes d’accueillir des compétitions internationales et ce, grâce à l’effort et l’abnégation des hautes instances du pays. Les gestionnaires locaux de la wilaya d’Oran, à leur tête le wali, Mr Said Sayoud à qui je rends hommage dans cette tribune, et à qui il faut rendre le mérite, ont été à la hauteur de la mission qui leur a été dévolue. Sous la coordination du président Abdelmadjid Tebboune, qui a donné carte blanche, le défi a été grandement relevé. A moins de 05 mois du lancement des jeux, Mr Sayoud et son staff, ont su, là où de précédents walis ont échoué, donner un coup de rein pour l’achèvement de tous les chantiers encore en instance pour être prêts le jour « J ». Un travail titanesque a été accompli. Pour preuve, le déroulement des jeux a été une réussite totale.
Le défi a été relevé, comme il a été relevé, encore une fois, lors de la visite du président français à Oran, Emmanuel Macron. Pour un wali, la tâche n’est pas toujours aisée pour accomplir des prouesses, quand plusieurs s’en accumulent à la fois. Oran, ses gestionnaires et ses hommes, a démontré qu’elle savait être à la hauteur des grands événements qui lui sont dévolus. Sans exagérer, je dirai que Monsieur le wali d’Oran, a été un homme de poigne, qui a su insuffler l’énergie nécessaire pour honorer Oran et par- delà l’Algérie.

Ouest Tribune : Il n’empêche que, beaucoup d’Oranais, parmi les personnalités publiques, sportives ou artistiques, disent avoir été marginalisés, pour ne pas dire écartés, de l’organisation de ces jeux, ajoutant même qu’Oran n’a pas été estimée à sa juste valeur ? Y a t-il un reproche que l’on puisse faire ?

Pr Boubekeur : J’acquiesce totalement, car à mon sens, la grosse bévue qui a été commise lors de la préparation puis l’organisation de ces jeux, c’est que l’on n’a pas donné de responsabilités aux gens de la ville d’Oran. Ils ont tout simplement été écartés. Comme s’il n’en existait aucune compétence à Oran. C’est scandaleux ! Là, je mets en cause la gestion de Mr Aziz Derouaz, qui a poussé l’affront jusqu’à ramener tout un personnel, femmes de ménage, chauffeurs, véhicules et autres, d’Alger. Il ne lui manquait que de ramener la plaque signalétique «Alger». L’affront ne s’est pas arrêté là, il a marginalisé Oran et ses personnalités, toutes catégories confondues. Nos invitations ont été obtenues grâce à la bonne volonté du wali d’Oran, et malgré cela, nous ne pouvions même pas accéder aux loges, car elles étaient totalement envahies par des personnes étrangères, vu que des invitations avaient été distribuées à tort et à travers. Mr Derouaz a invité à sa guise et qui il voulait. Les Oranais ont assisté aux jeux méditerranéens en dehors du stade. Mais le plus déplorable a été le piteux discours qu’il a prononcé , comme tout le monde l’a constaté.
En principe, aujourd’hui, on devrait lui demander des comptes. Il n’a pas fait honneur à Oran, il n’a pas fait honneur à l’Algérie. Je ne sais pas comment il a trompé les hautes instances. Des gens ont payé à cause de lui, certains ont été mutés ou encore, d’autres dégradés à cause de lui et de son organisation. Devait-il s’occuper uniquement du volet budget et du volet pouvoir ?
Et le reste ? Je rappelle que je lui avais fait un écrit que j’ai déposé au niveau du siège du COJM du Front de Mer dans lequel je l’ai informé que dans son discours, il avait omis de citer l’armée blanche qui s’était occupée de la gestion du Covid durant le déroulement des jeux. L’équipe de Slovénie touchée par le virus a été prise en charge par nos soins. Aucun hommage, n’a été rendu ! J’estime que des comptes doivent être rendus, car le mal fait à Oran est inconcevable.

Réalisé par Karim Bennacef

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