Le dollar qui a constitué pendant plusieurs décennies la monnaie exclusive pour la plupart des échanges commerciaux a perdu de son hémogénie. Cette situation est due principalement aux conséquences de la guerre en Ukraine qui a chamboulé l’ordre financier mondial.
Le recul de la dominance du dollar dans les échanges internationaux a été détaillé par l’analyste spécialiste des questions géoéconomiques et financières, Mahfoud Kaoubi, qui intervenait hier sur les ondes de la chaîne III de la Radio nationale. « Le conflit russo-ukrainien accélère le processus de recomposition de la carte géostratégique mondiale qui a commencé à connaître une mutation à partir des années 2010 avec la guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine », a-t-il déclaré d’emblée. Il a souligné que le conflit russo-ukrainien annonce un début du déclin du dollar comme monnaie de réserve mondiale et une recomposition sur le plan économique et commerciale.
Pour M. Kaoubi, ce déclin trouve son origine de la série de décisions de certains pays dont la Russie, la Chine et l’Inde qui ont annoncé qu’ils vont recourir au remplacement du dollar par leurs monnaies nationales. « La Russie a annoncé de recourir à la monnaie chinoise Yuan non seulement avec la Chine mais aussi avec ses différents partenaires économiques », a-t-il affirmé, soulignant que cette décision a eu des répercussions importantes sur le plan économique compte tenu du poids de la Russie notamment dans le domaine pétrolier et gazier. L’analyste financier a estimé dans ce cadre que l’Europe et les Etats-Unis ont mal évalué les répercussions du conflit entre la Russie et l’Ukraine, et que cela entraînerait un mouvement de solidarité et de remise en cause de l’ordre économique et financier mondial. « Les Brics, qui était en situation de latence, a vu son rôle beaucoup plus manifeste depuis le début du conflit », a-t-il ajouté.
Outre la décision russe d’abandonner le recours au dollar, d’autres pays notamment en Amérique Latine veulent emprunter la même voie. « Le Brésil et l’Argentine ont eux aussi annoncé leur volonté de créer une monnaie commune régionale pour les transactions de commerce extérieur », a-t-il souligné, citant aussi le cas de l’Arabie Saoudite. « La décision de l’Arabie Saoudite de procéder à ses transactions commerciales avec la Chine en Yuan, et cela a déjà commencé ce mois-ci », a-t-il déclaré. Il a évoqué aussi l’annonce du Ghana qui a décidé d’acheter son pétrole avec de l’Or, non pas en dollar. « Toutes ces décisions annoncent un début du déclin du dollar comme monnaie de réserve », estime M. Kaoubi.
Il a rappelé que les institutions monétaires héritées de la deuxième guerre mondiale ont mis en place un ordre financier et économique imprégné d’une logique impérialiste et libérale et consolidée par la mondialisation. « Cet ordre financier et économique est aujourd’hui remis en cause car le rapport de force sur le plan économique a changé avec la Chine et les pays du Brics représentent la moitié de la population mondiale avec près de 45% du PIB mondial et 35% du volume des transactions commerciales mondiales », a-t-il détaillé. Il a indiqué enfin que la Banque de développement des pays du Brics commence déjà à avoir beaucoup plus de présence dans le monde du financement.
Mohand S