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Pourtant bien des choses sont encore à améliorer:
Timimoune ou l’ensorceleuse oasis rouge

Timimoune ! C’est ici et nulle part ailleurs, qu’on coupe les ponts avec notre vie de stress et de contraintes qui nous oppresse au quotidien dans nos grandes villes bruyantes et polluées. C’est ici aussi qu’on découvre toute la beauté de notre pays, l’Algérie, et que l’on se réconcilie avec la nature qui s’étend à perte de vue et à perte de souffle.

C’est fou cette quiétude qui vous enveloppe dans ces lieux féeriques et enchanteurs. Dans cette cité d’ocre, cette oasis rouge qu’est Timimoune. Il y a comme une force qui vous happe et vide votre cerveau de tous vos tracas, et met en éveil total tous vos sens. Vos yeux réapprennent à s’attarder sur la contemplation de tout ce qui s’offre à eux. Vos doigts qui laissent glisser doucement et langoureusement ce sable chaud et presque réconfortant. Vos oreilles qui écoutent religieusement ce silence qui vous entoure. Votre odorat qui hume cette odeur que vous n’avez jamais senti ailleurs. Et tout cela a un nom. La magie ! La magie de la beauté dans toute sa splendeur.

Timimoune, qui se dresse majestueusement entre le grand Grand Erg Occidental et le plateau du Tademaït, est connue pour son architecture particulière et traditionnelle faite par les hommes qui y ont toujours vécu afin de s’adapter aux conditions extrêmes de ce désert qui s’étend à l’infini.

Et contrairement à ce qu’on peut croire, le paysage est loin d’être uniforme. À chaque fois, durant notre séjour, on découvrait des lieux tout aussi beaux que différents les uns des autres. De cette oasis envoûtante qui vous transporte dans le monde des milles et une nuit, à ces dunes dorées qui s’entremêlent avec grâce, à ce erg d’une dureté… soyeuse, à ces pierres et rochers hypnotisants de par leur beauté façonnée par la nature, tout est soigneusement agencé au delà de tout ce que peut attendre votre imagination. Car la réalité dépasse allègrement tout ce à quoi vous auriez pu vous attendre comme beauté et magie.

Cette tournée dans cette cité saharienne nous a aussi permis de rencontrer des personnes différentes, mais qui ont en commun leur amour de l’aventure, de la découverte ou de servir les lieux. Des touristes, des guides ou des hôteliers que nous avons interrogés pour nous parler de leur région, pour les uns, ou de leur ressentiment pour les autres, avec comme fond de discussion le tourisme en Algérie, qui malgré tous ces atouts peine à décoller dans notre pays.

Mohamed, guide touristique, estime que la sécurité sur place, qui reste nécessaire, doit se faire plus discrètement et espère qu’elle se fasse sur le modèle suivi à Djanet. Notre deuxième guide, Abdellaoui, qui lui demande plus d’aides de la part des pouvoirs publics pour le tourisme local et le tourisme en général, dira aussi  » qu’il est nécessaire de faciliter l’obtention des visas pour les étrangers, comme nous demandons qu’il y’ait des vols directs sur Timimoune. Pourquoi passer par Alger ou Oran avec tout ce que cela comporte comme perte de temps et d’attente pour les touristes? Nous aurions souhaité, aussi, que les vacances scolaires ne se déroulent pas au même moment dans toute l’Algérie, mais soient données à des dates différentes, car ceci nous pose un sérieux problème, puisque au mois de décembre et mars, il y’a un monde fou ici, et les hôteliers ou les propriétaires des maisons d’hôtes ne peuvent pas faire face à ce grand flux, alors qu’ils se retrouvent en quasi chômage juste après ces deux dates, avec d’énormes frais et dépenses pour leur personnel. Nous demandons aussi qu’il y ait une école pour la formation des guides, car c’est très important dans le tourisme. Enfin il faut plus d’engagement pour les questions d’hygiène et d’environnement ».

Pour un touriste algérien, homme d’affaires, rencontré sur les lieux, le tourisme et sa réussite c’est l’affaire de tout le monde, gouvernement comme habitants de ces régions, car ce secteur permet de créer du travail et de booster l’économie nationale. « Pour moi, il est clair que dans ce domaine, les choses sont en train de changer positivement, et c’est un bon présage pour notre pays ».

Parmi les autres personnes que nous avons aussi interviewées, il y’a Benoît, un Français originaire de Paris, qui s’est dit subjugué par la beauté des lieux qu’il visite, pour la première fois, en compagnie de sa femme Cécile et leur petite fille de huit ans. Lui qui a élu domicile chez Saïd Belkacem (dont nous parlerons plus loin), s’est dit très contrarié par « cette construction mi-achevée ou mi- entamée, qui obstrue la vue sur les magnifiques dunes qui se trouvent juste derrière notre lieu d’hébergement ». Mais ce qui a grandement contrarié notre touriste français ce sont ces tracasseries administratives qu’il a dû affronter pour avoir le visa pour l’Algérie. Cette famille selon Benoît a plutôt beaucoup voyagé  » mais c’est là notre premier voyage en Algérie, et nous avons privilégié le Sud, avec deux destinations : Ghardaïa et Timimoune. Et le voyage se passe agréablement bien et nous avons été bien accueillis. L’Algérie, malgré la proximité culturelle avec la France, notamment l’histoire, poursuit Benoît, n’est pas un pays très visité par les Français, hormis les Français d’origine algérienne . C’est une destination qui était jusqu’à lors déconseillée par le gouvernement français , à travers notre ministère des Affaires étrangères, mais cette dernière année et notamment ces dernières semaines ces restrictions ont été levées sur cette région, et c’est ce qui a motivé notre venue, sachant aussi que ce n’est pas facile de venir en Algérie puisqu’il faut faire une demande de visa auprès du consulat algérien. On doit se rendre en personne au consulat et fournir des documents importants, en plus du fait que les frais demandés pour ce visa sont coûteux puisqu’il faut verser 110 euros par personne. Le billet d’avion, par rapport à d’autres destinations du pourtour méditerranéen, est lui aussi élevé. Ce sont là, à mon avis, des freins pour la venue en masse des Français. Et il y a aussi cet autre frein que nous avons découvert sur place, puisque nous aurions voulu faire des randonnées chamelières et organiser des bivouacs, mais cela n’a pas pu se faire à cause de certaines restrictions et l’impossibilité pour nous de pouvoir dormir en dehors des hôtels, et cela freine aussi les Français qui aimeraient découvrir le désert par tous les temps et partout ».

Ahmed, médecin en préretraite, et qui dit profiter de cette retraite pour faire ce qu’il qualifie de son pèlerinage à Timimoune une ou deux fois par an, estime que « le tourisme est une politique d’État. Jusqu’ici on nous a parlé que l’Algérie a deux domaines où elle peut faire beaucoup de choses sans avoir besoin de pétrole ou de gaz. Il s’agit du tourisme et de l’agriculture, et malheureusement pour le tourisme on ne fait que parler depuis 1962, c’ est -à- dire depuis 60 ans. et on n’a pas avancé dans ce domaine. Et c’est malheureux, car à côté nos voisins eux, ils ont bien avancé dans le domaine, et pourtant Dieu sait l’ extraordinaire potentiel dont jouit notre pays. Moi j’ai toujours travaillé, dans mon domaine, chez nos voisins et travaillé ici en Algérie, donc j’ai toujours été Maghreb, un peu MENA comme on dit. C’est dommage que nous n’exploitions pas ce que nous avons, et cela fait le bonheur des autres. Si on exige, comme a dit Benoît, aux gens pour venir en Algérie un visa qui coûte je crois 110 euros, encore qu’en France c’est un cas particulier puisqu’il y’a des consulats un peu partout, mais si on va à côté c’est à dire en Espagne ou en italie, quelqu’un qui habite à Naples par exemple doit aller à Rome et il trouve beaucoup de difficultés. Si on parle de tourisme je crois qu’on a besoin de gens qui viennent en nombre. Donc le tourisme soit on veut le faire, soit on ne veut pas le faire, et si on dresse autant de lourdeurs et d’obstacles devant les gens, alors ils ne viendront jamais et iront ailleurs. Par ailleurs, en Algérie on ne parle que du tourisme saharien alors qu’il existe divers tourismes dans notre pays, culturel, religieux , de ski et bien d’autres encore. On ne parle que du tourisme saharien qui ne marche que trois ou quatre mois par an. Quelqu’un qui investit et fait des chambres d’hôtes qui coûtent 100.000 ou 200.000 euros et même plus, il travaille à la mi-octobre et deux autres mois et c’est tout. Après ce temps, il doit fermer en payant le personnel de gardiennage et autres frais encore. Donc quelqu’un qui veut investir dans ce domaine ne se retrouve pas. Pourtant plusieurs ministres sont venus sur place et des réunions ont été tenues avec les professionnels du tourisme dans la région pour exposer ces problèmes, mais il n’y a eu aucune suite. Le tourisme est une politique et c’est une culture. À cela il faut ajouter l’éducation, chacun doit balayer devant chez lui. Il est malheureux de voir tous ces sachets plastiques couvrir de grands pans des dunes. La culture touristique n’ est pas encore entrée dans les mœurs. Pour terminer, j’espère que ces avis vont trouver écho au niveau des décideurs ».

Enfin, on ne pourrait pas clore ce chapitre des témoignages sans parler de Saïd Belkacem. Cet homme qui a investi dans le domaine touristique saharien aussi bien à Ghardaïa qu’ici à Timimoune, où il a déjà deux sites de maisons d’hôtes où tout est fait pour offrir aux touristes les meilleurs services et surtout à rester dans l’atmosphère et la particularité de la région. Tout est fait, par cet entrepreneur engagé et dynamique, pour vivre pleinement ces moments uniques et privilégiés en parfaite harmonie avec la nature saharienne.

Mais le fait que Timimoune soit aujourd’hui une wilaya à part entière, après la décision du président de la République, Abdelmadjid Tebboune , du 21 février 2021 de promouvoir dix (10) circonscriptions administratives du Sud du pays en wilayas, permettra, à coup sûr, à cette jeune wilaya de connaître un essor touristique et économique beaucoup plus important, avec des dotations financières bien plus importantes que par le passé. Ce changement contribuera, à court ou à moyen terme, à régler bien des problèmes et entraves auxquels fait face actuellement cette belle région qui ne peut avoir qu’un avenir plus prometteur, car elle a tous les atouts pour réussir et devenir, dans un avenir très proche, l’une des destinations les plus importantes dans le tourisme local, régional et même mondial. C’est là un pari et un défi qui seront relevés, et nous n’en doutons absolument pas, par tous les acteurs du tourisme local et national.

A.B

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