Ceux, parmi les observateurs locaux à Aïn El Türck ou même les simples citoyens, qui considèrent que la localité vit depuis quelques années, un surpeuplement incontrôlé, voire néfaste à l’avenir pour son fragile équilibre macro-économique et même social, s’appuient sur des réalités déconcertantes que sont la naissance et la prolifération des bidonvilles dans les endroits les plus reculés, loin des regards, aux abords des terres agricoles, de la décharge publique ou sur des terrains non construits jouxtant parfois des cités urbaines.
Quasiment invisibles pour un « œil non averti », des masures s’étalant sur plusieurs centaines de mètres carrés, laissant transparaître juste un bout d’antenne parabolique et le couvercle d’une citerne à eau, se sont en effet implantées au fur et à mesure que le permettaient les circonstances, dans les espaces fonciers disponibles et jugés les mettre confortablement à l’abri du regard, souvent dans des conditions de vie indécentes, notamment pour les enfants en bas âge. Pour les habitués de la zone balnéaire, particulièrement, ses habitants, les enfants, parfois des écoliers, ainsi que des femmes et des familles entières, qui enjambent la balustrade qui sépare les deux voies de l’autoroute menant vers les Andalouses, pour rejoindre leurs domiciles situés de l’autre coté de la zone urbaine, le spectacle n’étonne presque plus, tant celui-ci s’est installé dans l’imaginaire collectif.
En fait, aujourd’hui, ces bidonvilles naissants se sont installés des deux cotés de la double voie, sur des terres apparemment squattées. Le plus remarquable, est que dans certains de ces bidonvilles, la vie tente de s’organiser du mieux qu’elle peut, avec des constructions en dur et en tôle ondulée mais également avec des baraques faisant office de petits commerces où sont proposés quelques services comme les cigarettes, eau, pain, etc. Déjà confrontée au phénomène des constructions illicites et autres points noirs que les pouvoirs publics ont tenté, depuis des années d’éradiquer ou plutôt de freiner, voilà que la commune d’Aïn El Türck se retrouve avec, sur les bras, un épiphénomène encore plus malicieux, imperceptible, qui a pris ou eu, le temps de fondre dans la nature et se lover dans les dédales de la contrée, pour devenir presque indéracinable. Et pour cause, des enfants y sont nés, y ont grandi, sont scolarisés ; d’autres sont à l’âge adulte, leurs parents assimilés à la vie socio-économique de la cité et qu’il faudra un jour reloger s’il va falloir récupérer ces terres. Un legs lourd dont hérite l’administration locale et dont héritera assurément la future assemblée communale et auquel il faudra y trouver une solution à cette problématique, au demeurant assez compliquée, vu le nombre de dossiers de demandes de logements en attente pour la seule commune d’Aïn El Türck. Le phénomène est devenu tentaculaire et touche désormais toutes les contrées de la daïra. Comme quoi, cela va nécessiter un véritable plan « Marshall » et de gigantesques moyens pour venir à bout de cette situation. Il va sans dire que dans une zone où le taux de chômage est des plus chroniques et touche de plus en plus, une population juvénile, la dégradation du mode de vie est inéluctable et ne peut plus l’être que ce qu’elle est aujourd’hui, comme en attestent l’apparition des fléaux sociaux et la ghettoïsation de certains lieux.
Les choses étant désormais ce qu’elles sont, il serait peut-être judicieux de prévoir une dynamisation du tissu économique par la création d’une zone semi-industrielle en rapport avec les métiers de la pêche, la réalisation d’un port de pêche, la relance de la zone d’extension touristique de Cap Falcon, (ZET), un projet mort-né, la revivification du projet de la ferme pilote qui faisait nourrir beaucoup d’espoir pour les agriculteurs de la région et leurs enfants avant d’être mystérieusement abandonné bien que budgétisé par l’Etat, et détourné de sa vocation, revoir la carte touristique puisque l’infrastructure hôtelière existe, etc. Les opportunités ne manquent pas pour insuffler une dynamique économique durable dans la station balnéaire et tenter d’une part, d’absorber le chômage et de l’autre, endiguer l’avancée des fléaux sociaux et surtout donner la chance aux citoyens d’aspirer à une vie décente.
Karim B