Ces rues et quartiers qui perdent leur charme et leur spécificité…
L’anarchie souvent constatée en matière d’aménagement urbain reste liée à un manque de contrôle et de respect de la réglementation dans le secteur de l’architecture, de l’urbanisme et de la construction. Bon nombre de citoyens et d’observateurs avisés dénoncent souvent la floraison de ces tours de plusieurs étages dans des sites urbains dits résidentiels censés être protégés par le fameux plan d’occupation des sols. Un peu partout, à Maraval, aux Castors, et même au milieu d’anciennes coopératives d’habitat individuelles à Bir el Djir, Es-sénia et ailleurs, de grands immeubles d’une dizaine d’étages surgissent de terre à la place d’une petite résidence démolie par un riche promoteur. Pour les mauvaises langues locales, cette «capacité financière » à pouvoir lancer un projet de construction de tour d’affaire ou d’hôtel à douze étages bloquant la vue et les rayons de soleil sur les maisons voisines, est le signe d’une dangereuse déstructuration sociale qui ne cesse de forger le culte de la régression et le recul des valeurs du savoir-vivre en collectivité. Très souvent, des habitants d’un site résidentiel se rendent dans les rédactions des journaux locaux pour déposer des lettres ouvertes aux responsables condamnant ce qu’ils jugent être des atteintes à leurs droits et à leur citoyenneté. Il s’agit notamment de l’occupation d’assiettes foncières censées être réservées à un espace vert, une école, ou une autre infrastructure sociale. Une occupation parfois justifiée par une affectation jugée illégale et abusive à un projet d’investissement immobilier privé. Des constructions en grande hauteur qui parfois ne respectent aucune règle urbanistique ou norme architecturale. Des pratiques de construction qui amplifient l’ambiance d’impunité dénoncée par les habitants de certains quartiers victimes impuissantes de ces inepties urbaines. Oran, depuis ces quelques dernières années, est devenue la ville des nombreux chantiers de constructions de tours de promotions immobilières, défigurant ici et là le décor architectural et esthétique de la ville. A l’image de l’avenue de Canastel, de l’avenue d’Arcole et de bien d’autres artères qui étaient même jadis inscrites à un projet d’élargissement de la voie après démolition des extensions illicites. Depuis ces dernières années, Oran a connu une véritable transformation de son paysage urbain, accentuée par la réalisation de nombreux immeubles de grande hauteur greffés sur un tissu urbain qui n’a pas été prévu pour cela. Ce qui, à court terme, risque de poser de sérieux problèmes en matière de voirie et réseaux divers, d’assainissement, d’alimentation en eau potable et autres besoins sociaux collectifs. Tandis que des opérations d’aménagement et d’embellissement urbain sont annoncées ou en cours d’achèvement dans certaines zones et quartiers, beaucoup reste encore à faire et à améliorer en matière de gestion de la croissance urbaine et de maintenance du cadre de vie collectif dans bon nombre de grandes cités d’habitat, de rues et de quartiers qui perdent peu à peu leur charme et leur spécificité. Des rues et des quartiers déstructurés et fragilisés par les constructions en hauteur tolérées et appréciées pour rentabiliser un foncier de plus en plus rare et convoité. Le manque de vision globale, le non-respect des règles d’urbanisation et parfois même l’absence de plan d’aménagement, ne pouvaient que conduire à la clochardisation et à l’anarchie urbaine sous toutes ses formes.
Par S.Benali