
Cheb Mami fait son grand retour : une nuit de raï inoubliable
Oran a vibré, en cette fin de semaine, sous le rythme envoûtant du raï, porté par la voix à la fois unique et exceptionnelle de Cheb Mami au CCO. L’enfant prodige de Saïda, adulé depuis les années 1980 comme l’une des figures mondiales de ce genre musical né en terre oranaise, a offert un concert exceptionnel qui restera longtemps gravé dans les mémoires.
Dans une atmosphère festive, des milliers de spectateurs, toutes générations confondues, se sont donné rendez-vous pour retrouver celui qu’on surnomme «le prince du raï». Dès les premières notes, l’émotion était palpable.
Le public, rassemblé dans un espace spécialement aménagé pour l’occasion, a repris en chœur les refrains cultes qui ont marqué l’histoire du raï moderne. De “Ma vie» à «Parisien du Nord», en passant par «Desert Rose», son célèbre duo avec Sting, Cheb Mami a enchaîné les tubes, mêlant nostalgie et énergie. Chaque morceau déclenchait une ovation, comme un hommage collectif à un artiste qui a su porter haut les couleurs de la musique algérienne sur la scène internationale.
L’événement n’avait rien d’un simple concert, il sonnait comme un retour aux sources, une réconciliation entre une ville et l’un de ses plus illustres ambassadeurs. Car si le raï est né dans les ruelles populaires de l’Oranie, il a depuis conquis le monde. Et voir Cheb Mami se produire dans la capitale de l’Ouest algérien n’était pas seulement un moment artistique, mais aussi un symbole identitaire. «C’est une fierté de retrouver Mami ici, chez lui, devant son public. C’est plus qu’un chanteur, c’est une partie de notre histoire», confiait une spectatrice, les yeux brillants d’émotion. La scène, magnifiquement éclairée, offrait un décor à la hauteur de l’événement. Les organisateurs avaient misé sur une production moderne, avec des effets de lumière et une sonorisation soignée, permettant de magnifier la puissance vocale de l’artiste. Entouré de musiciens talentueux, Cheb Mami a livré une performance généreuse, multipliant les interactions avec la foule, dansant, improvisant, rappelant par instants la fougue de ses débuts. Ce concert s’inscrivait également dans une volonté portée sur la valorisation de la culture locale et à redonner à Oran sa place de capitale musicale. Après le succès du festival du raï et de plusieurs événements estivaux, cette soirée venait confirmer le renouveau culturel de la ville.
«Oran a toujours été le cœur battant du raï». Accueillir Mami, c’est aussi réaffirmer cette identité et montrer que notre patrimoine musical reste vivant», soulignait un responsable du secteur de la culture. Les jeunes présents, parfois trop jeunes pour avoir connu les grandes heures du raï des années 1990, découvraient l’artiste avec émerveillement. Beaucoup filmaient la scène avec leurs téléphones, immortalisant un moment qu’ils partageront sûrement longtemps.
Les plus anciens, eux, semblaient retrouver une part de leur jeunesse à travers ces mélodies intemporelles. Entre les générations, la musique faisait son œuvre, elle rassemblait, effaçait les écarts d’âge et rappelait que le raï, au-delà des modes, reste un langage universel. La soirée s’est achevée dans une explosion de sons et de lumières, avec un public debout, réclamant encore et encore. Cheb Mami, visiblement ému, a salué longuement la foule, promettant de revenir. Dans les rues avoisinantes, les chants continuaient, preuve que l’écho de cette nuit magique résonnera encore longtemps. À Oran, ce concert a eu valeur de symbole.
Plus qu’une performance artistique, il représentait un moment de communion entre un artiste et son public, entre une ville et son héritage. En redonnant vie à ses classiques, Cheb Mami a rappelé que le raï, né dans l’Ouest algérien, reste une musique d’émotion, d’amour et de liberté. Une musique qui, hier soir, a prouvé une fois encore qu’elle pouvait fédérer les cœurs et rallumer la flamme d’un patrimoine culturel unique.
Yacine Redjami