Combien d’agents municipaux exercent véritablement leur métier ?
En soulignant que dans les listes du personnel de la commune d’Oran le nombre d’agents de collecte s’élève à 3.378, alors que leur recensement sur terrain indique seulement 1.263 agents actifs, les fonctionnaires de l’Agence nationale des déchets pensent peut-être avoir découvert le plus gros scandale de l’année, ouvrant la porte à des promesses de poursuites judiciaires et à des «sanctions exemplaires». En réalité, ceux qui depuis longtemps suivent de près le parcours de gestion de la grande mairie d’Oran savent bien que cet écart entre les chiffres déclarés et le décompte réel effectué sur le terrain n’est que le résultat d’un manque de rigueur dans la gestion et l’actualisation des fichiers du personnel en matière de mutation, d’affectation et de promotion des agents concernés. Il se trouve que la Direction de l’hygiène et de l’assainissement, la plus grande et la plus «puissante» en termes de nombre d’agents et de moyens de pressions sur la hiérarchie municipale, connaît depuis des lustres des «couches stratifiées» de personnel , souvent des saisonniers qui seront plus tard permanisés, recrutés sur le papier en tant qu’agents de collecte des ordures ménagères, mais affectés à d’autres tâches et à d’autres services. Ainsi au fil des ans et des assemblées élues aux commandes de l’APC, bon nombre d’agents de nettoiement se sont retrouvés chauffeurs, gardiens d’école, agents de sécurité, voire même agents de bureau ou préposé au courrier. Certains, plus téméraires que d’autres, ont même «percé» dans leur carrière, devenant des chefs d’équipe syndiqués et redoutés par les élus pour leur «capacité de nuisance» par les remous et l’agitation organisée. Mais ces transferts de personnel de la DHA vers d’autres structures municipales n’ont pas toujours été régularisés sur le plan administratif, sachant combien la machine bureaucratique municipale était grippée, dépassée et bien incapable de gérer les taches élémentaires propres au fonctionnement normal d’une APC. Les Oranais, parmi les plus anciens, se souviennent de certains maires aux commandes de la mairie qui n’hésitaient pas à affecter dans leurs propres foyers chauffeur, cuisinier, gardien, femme de ménage et ouvriers d’entretien qui ensuite s’évaporaient dans la nature tout en percevant leurs salaires durant des années. A Oran, la plus grande commune d’Algérie en termes de population, les dérives et le laisser-aller ne pouvaient qu’être amplifiés par la course aux prébendes et aux privilèges liés à un statut usurpé… Aujourd’hui, heureusement, les choses ont bien changé. On est au moins en mesure de compter les agents de collecte exerçant véritablement leur métier…
Par S.Benali