EDITO

Fausses démocraties

Branle-bas de combat au sommet du pouvoir français à Paris. Des centaines de policiers et de gendarmes ont été dépêchés en renfort dans un département d’outre-mer. Aux Antilles françaises, rien ne va plus. «Les forces de l’ordre ont dû faire usage de leurs armes de service», entend-on dans les informations. C’est terrible pour tout État d’user d’armes à feu contre des manifestants civiles. Mais cette grave dérive n’a suscité aucun commentaire du Conseil de l’Europe. On aurait pourtant attendu une réaction, quelque chose qui soulignerait l’incompétence d’un pouvoir, visiblement en rupture avec sa société. Cette attente était d’autant plus légitime que deux jours avant le fâcheux incident, la police hollandaise a fait usage de tirs à balles réelles pour disperser des manifestation contre le pass sanitaire. L’absence de toute réaction à cette première dérive était en soi un sérieux problème. Que l’Europe laisse ses membres déraper de la sorte, c’est qu’il y a un véritable problème de démocratie et de droits de l’homme dans cette région du monde.
La mobilisation des forces de l’ordre et leur grande brutalité en Europe est un fait établi. Dans d’autres pays et pour les mêmes raisons de contestation de l’ordre sanitaire imposé par les pouvoirs en place, des dizaines de manifestations sont réprimées sans ménagement. Gaz lacrymogène, balle en caoutchouc et charge policière féroce sont le lot des contestataires des pass sanitaires en Europe. Cela est une réalité. Qu’on arrive à l’usage d’arme à feu par la police et que personne ne s’en émeuve, c’est qu’une frontière a été franchie.
L’entêtement de ces pouvoirs témoigne de l’absence de dialogue et la rupture de confiance entre le peuple et ses gouvernants. En fait, le malaise vient du fait, justement qu’il existe, en France, en Hollande et ailleurs en Occident, une frange de la société qui rêve de reconduire l’expérience révolutionnaire chez-eux. Ils en rêvent parce qu’ils n’ont rien à perdre. Et c’est cela qui fait faire des sueurs froides aux politiciens. La panique est telle que même les gouvernements en sont arrivés à interdire purement et simplement le droit à l’expression populaire dans la rue. Aux Antilles et en Hollande, c’est le cas. Aucun Etat européen n’a trouvé cela inquiétant. Pourtant, lorsque pareille décision est prise en Russie, en Egypte, en Chine, où ailleurs en dehors des frontières occidentales, le Conseil de l’Europe, ses ONG des droits de l’homme, son parlement sortent du bois et crient à l’injustice et la dictature. Bref, l’anarchie c’est bien, tant qu’elle reste une spécificité du tiers monde et qu’elle permet de sauver la face faussement démocratique de l’Europe.
Par Nabil G

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