Placée sous l’égide du Ministère de la Santé et de la Direction de la Santé d’Oran, la deuxième édition intitulée « Traumatologie du Sport », s’est ouverte avant-hier, à l’hôtel « Le Méridien » en présence de pas moins de 200 médecins spécialistes en traumatologie et chirurgie orthopédique de différentes régions du pays et des deux invités d’honneur français, le docteur Nicolas Lefevre et le professeur Frédéric Khiami, des référents internationaux qui traitent des joueurs internationaux et des sportifs de haut niveau.
Après l’annonce officielle inaugurant l’ouverture du colloque, proclamée par la SG de la DSP d’Oran, différentes thématiques en rapport avec la pratique du sport, notamment les blessures sportives, la prise en charge thérapeutique de la rupture haute des ischios-jambiers mais aussi du signe du dormeur, ainsi que des ontologiques en rapport avec les blessures sportives, les blessures du cartilage et des tendons, celles des ligaments croisés intérieurs et les blessures osseuses, ainsi que le retour au sport après la pose d’une prothèse de genou, ont constitué l’essentiel des interventions de la part des spécialistes.
Le professeur Frédéric Khiami, chirurgien orthopédiste et traumatologue du sport qui exerce à l’hôpital Pitié-Salpêtrière à Paris et à la clinique du sport de l’hôpital américain s’est exprimé sur les lésions ostéochondrales du talus, les fractures de fatigue ou encore l’intérêt d’une PTG sur mesure. Le Dr Nicolas Lefèvre, Chirurgien orthopédiste, chirurgien du sport et traumatologue a, pour sa part, animé des interventions sur plusieurs thèmes, notamment sur la chirurgie du sport, la chirurgie ligamentaire et la chirurgie prothétique.
Les débats qui suivront sous forme de question-réponse, porteront sur les nouvelles innovations consacrées à la traumatologie sportive, une branche de l’orthopédie sportive spécialisée dans le diagnostic et la thérapie des blessures et des maladies dégénératives résultant d’activités sportives, y compris le diagnostic des troubles musculosquelettiques ainsi que les traitements conservateurs et chirurgicaux, destinés aux athlètes professionnels et amateurs, dans le but de traumatologie sportive pour permettre au patient de pratiquer à nouveau le sport. Il y a lieu de noter la bonne organisation de la conférence du comité d’organisation représenté par le Dr M.Amine Abdelmoumen, Président du comité d’organisation de cet évènement, le Dr A. Daïkh, le Dr. Bared, le Dr S. Makhlouf et le Dr M. Boudjellal.
Dr Abdelmoumen, Mohamed El Amine, chef de service de chirurgie orthopédique EH « ThamiThamiMedjbeur » Aïn El Türck
« Nous œuvrons à instaurer un diplôme de traumatologie du sport au niveau de nos facultés de médecine »
L’objectif recherché à travers ce colloque, est double, à savoir, la création d’un espace interactif entre les professionnels de la santé, d’une part et de l’autre, faire surtout profiter nos médecins, des expériences des deux éminents experts français que sont le Dr Nicolas Lefevre et le professeur Frédéric Khiami, sur le plan de la traumatologie du Sport, vu que nos médecins n’ont pas la possibilité d’effectuer des séjours en France. L’Algérie est un pays de sport avec beaucoup de jeunes qui pratiquent différentes disciplines sportives, ce qui implique la fréquence des blessures et le besoin de médecins formés dans ce domaine.
L’idée a donc consisté à les inviter chez nous, mais l’on ne va s’arrêter là, car nous avons plein de projets avec eux, dont celui d’instaurer un diplôme de traumatologie du sport au niveau de la faculté de médecine afin de former des promotions dans ce domaine. Nos médecins ne sont pas moins compétents, nous avons une formation en chirurgie orthopédique mais la prise en charge du sportif est très différente d’un sujet normal. Le sportif a des exigences de reprise de sport, contrairement à un sédentaire qui n’a pas cette exigence. Pour l’exemple, la situation est moins dramatique pour un sujet dit normal qui vit avec un ligament croisé déchiré que pour un sportif qui est tenu par l’exigence de reprise de sport et qui s’interroge quand il peut reprendre ses activités.
A partir de cette formation, on veut initier nos chirurgiens à l’esprit de sous-spécialisation, parce que la traumatologie du sport est une entité à part, avec un programme précis et toute une théorie. Quand on constate que nos sportifs algériens vont à l’étranger pour une rééducation, on se dit que nous disposons d’assez de moyens et pourquoi, on ne fait pas ça ici chez nous. Ceci a pour effet aussi de minimiser les frais à l’étranger. Cependant, il faut se donner les moyens. Si tu ne les as pas, tu vas dépendre des autres, ce qui n’est pas sans conséquences.
L’orthopédie, c’est de matériel, ça a un coût financier, mais ça évite des dépenses. Concernant la participation algérienne, on s’est limité à 200 inscrits, vu nos moyens limités et faute de sponsors. Toutefois, les présents ont affiché leur satisfaction, vu qu’ils sont repartis riches en enseignements et de données, dont ils n’en étaient pas dotés auparavant. Quant à la participation des professionnels du sport, c’est en fait un projet que nous mûrissons, et je crois qu’avec la vraie professionnalisation des clubs et la sédation des clubs vers des entreprises nationales, ça pourrait se faire. Avec un partenaire comme Sonatrach, par exemple, qui est dotée d’une bonne gestion, on pourra faire beaucoup de choses. Concernant les deux experts français, le Dr Nicolas Lefevre est une pointure mondiale, il fait beaucoup le genou, les ischios jambiers, une pathologie qu’on a commencé à traiter récemment.
Il est pratiquement le seul chirurgien en France à le faire. Le Pr Frédéric Khiami, est un éminent chirurgien du sport, il opère toutes les stars du foot ainsi que les sportifs de haut niveau, y compris Ronaldo le Brésilien, qu’il a opéré d’ailleurs en 2008. Quant à votre question sur l’état de santé en général des sportifs algériens, je cite un adage qui dit « un corps sain dans un esprit sain ».
Autrement dit, le sportif algérien doit faire preuve d’un peu plus de conscience en matière d’hygiène de vie et d’un minimum d’exigence intellectuelle. Un sportif qui ne s’instruit pas ou n’essaie pas d’élever un tant soit peu son niveau intellectuel, cela posera problème pour la réussite dans carrière professionnelle, car il ne peut pas se documenter, ni suivre les règles. Pour l’exemple, la différence est toute faite avec des joueurs algériens formés à l’étranger, qui sont plus rigoureux, bien encadrés, et ceux issus du championnat local. Pour finir, je précise que la prochaine édition sera dans 2 ans, mais cela ne veut pas dire qu’avec cette clôture, que les discussions et les consultations vont cesser. Les échanges vont continuer entre les collègues de la profession.
Dr Nicolas Lefevre, Chirurgien orthopédiste et traumatologue – France
« Initier la médecine sportive à la traumatologie est une nécessité en Algérie »
Il y a lieu de savoir que la traumatologie du sport, ou la chirurgie du sport, est une vraie spécialité à part entière. D’ailleurs, en France, on a des diplômes validant la traumatologie du sport. L‘organisation d’un tel colloque, est une occasion de partager les expériences et de communiquer les informations sur les dernières technologies ainsi que la transmission des compétences pour les plus jeunes. C’est d’ailleurs, une des propositions de cette 2èmejournéeet qui consiste à continuer la formation de ces jeunes sur la promotion de la traumatologie du sport. En France la traumatologie du sport c’est énormément développé, le pays fait partie de l’élite mondiale. En termes de formation et d’échanges d’expérience, nous recevons assez facilement de jeunes chirurgiens étrangers qui viennent nous voir au bloc opératoire pour une semaine ou deux, que l’on forme, il faut juste que l’on s’organise et que nous obtenions les autorisations requises. Le professeur Amine Abdelmoumen vient quasiment tous les ans pour des séjours de 3 semaines chez nous pour se former. J’estime qu’en Algérie, il faut absolument initier la médecine du sport à la traumatologie.
Pr Boubekeur Mohamed, chirurgien-sénateur
« Le médecin algérien a soif de formation »
La rencontre d’aujourd’hui est très positive, car le médecin algérien a soif, très soif de formation. A partir du moment où l’on ramène deux experts qui sont formés dans la discipline de la traumatologie du sport, qu’ils vont transmettre des messages, leur montrer un matériel qui est optimum, toutes les innovations et autres technologies qui existent en matière de pathologie sportive, nos médecins vont acquérir cette pathologie, c’est quelque chose d’extraordinaire. Aujourd’hui, avec peu d’expérience on peut apprendre et transmettre beaucoup de messages à beaucoup de médecins qui veulent se spécialiser dans la médecine du sport qui est bénéfique pour notre pays. Le message est clair, il suffit d’être consciencieux, de vouloir produire dans son pays, de s’occuper des malades convenablement et nous aurons des résultats extraordinaires. Ceci dit, pour répondre à votre question, dans mon allocution, j’ai parlé de choses nouvelles, c’est-à-dire l’imagerie. L’imagerie, c’est pour tout le monde, que ce soit en 3D, c’est-à-dire qu’on a doublé, ce n’est plus l’espace en 2D, c’est l’espace en 3D et même en 4D, surtout la chirurgie des membres, du squelette, c’est une chirurgie fonctionnelle et dynamique.
Mais les progrès se sont faits en même temps, que ça soit, le digestif, l’urinaire, que ce soit le cerveau, c’est-à-dire qu’on bénéficie d’une imagerie qui est moderne et puis en même temps, nous avons une sorte de réhabilitation moderne. C’est-à-dire que le malade ne reste plus très longtemps dans les services, c’est pour cela qu’on aboutit à une chirurgie qu’on appelle mini-invasive, voire même robotisée ; donc ceci fait qu’aujourd’hui, le malade ne souffre pas, nous avons un contrat moral avec lui, nous lui disons, oui, tu peux nous faire confiance, nous allons t’opérer avec de bons résultats et tu ne souffriras pas, tu ne resteras pas longtemps à l’hôpital. Et nous veillerons, d’un autre côté, et là je parle en tant que politicien, sur le coût de la santé.
Aujourd’hui, on devient optimal en matière d’économie, donc à ce moment-là, si le malade séjourne peu dans le service, automatiquement, on va vers ce qu’on appelle la chirurgie ambulatoire et donc économie de médicaments, économie du séjour hospitalier. Ça coûte très cher, une nuit dans un service de soins intensifs quand on la calcule, vous voyez ça à l’étranger, c’est plus de 3000 €. Le Dr Nicolas Lefevre a parlé de la rupture des ischios jambiers, et il a dit qu’il pourrait y avoir un hématome. L’hématome, s’il est compressif au niveau de la cuisse, ça peut entraîner des douleurs, ça peut même entraîner des paralysies du nerf sciatique, mais cela n’est qu’une pathologie ; demain si on veut travailler sur la coiffe des rotateurs, l’espace est très réduit et il faut absolument pénétrer avec des petites caméras pour pouvoir régler le problème, libérer l’espace et le patient peut sortir le soir même, sans souffrance, sans antibiotiques, sans rien du tout.
Moi je pense que c’est très important, il faut absolument aller vers la chirurgie mini-invasive, l’arthroscopie, aller vers une chirurgie qui soit avec des prothèses plus allégées. Tout ce que je dis, c’est que, la chirurgie du sportif, est fonctionnelle ; le sportif est quelqu’un qui est jeune, qui est dynamique, le bassin bouge. Maintenant ce que je veux dire, c’est que, c’est une journée de formation qui devait être une formation continue, de façon à ce que les chirurgiens orthopédistes qui participent à ce colloque, soient formés à la chirurgie orthopédique, à la chirurgie de sportif.
Aujourd’hui, nous avons beaucoup de complexes olympiques et de stades, nous participons à des compétitions maghrébines, africaines, voire mondiales, donc il faut absolument qu’on prenne soin de nos athlètes, nos athlètes sont jeunes, donc il faut qu’ils souffrent moins, que les traumatismes et les agressions soient moindres, de façon à pouvoir les mettre rapidement sur le terrain, quand vous savez qu’un sportif au-delà de 40 ans, il ne plus rien faire. Pour la précision, quand je dis chirurgie fonctionnelle et dynamique, c’est une chose et quand je dis coût, économique et de santé, c’est autre chose. Même si ce n’est pas un sportif, on doit veiller avant tout à la santé du patient, c’est ça le plus important.
L’économie de santé, vient après. Aujourd’hui, les technologies se sont développées, on opérait en gardant l’abdomen et on ouvrait, on opérait une cassure de fémur en l’ouvrant sur 15 à 20 cm, mais aujourd’hui, non, c’est une chirurgie mini-invasive sur des radiologies. Donc tout ceci, l’évolution des technologies, l’évolution des moyens de dépistage, la chirurgie mini-agressive, les antibiotiques qui sont beaucoup plus appropriés, la ranimation, l’analgésie post-opératoire, tout ceci fait en sorte que le sportif est bien pris en charge mais il faudrait le remettre sur le terrain le plus tôt possible avec un minimum d’agression et de bons résultats, en ce qui concerne les ruptures ligamentaires. Si on prend la chirurgie de l’épaule, si on prend la chirurgie ligamentaire, si on prend la chirurgie méniscale, tout ceci, se fait en ambulatoire.
Par Karim Bennacef