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Les enfants dans le turbulent monde du travail:
L’affligeante réalité d’un inquiétant phénomène

Illustrant lamentablement le désarroi, qui dépasse tout entendement, de ces enfants, victimes de fâcheuses circonstances, et livrés à eux même dans les rues et les boulevards de la capitale de l’ouest, une vidéo choquante postée, en fin de semaine, sur la toile et ayant fait le buzz sur les réseaux sociaux, a suscité indignation et sidération chez le plus imperturbable des internautes.

Il s’agit d’un enfant vêtu de haillons, âgé d’environ treize ans, emmitouflé dans une toile en plastique et recroquevillé en chien de fusil, dormant au bord d’une tranchée sur le bas-côté d’une route à grande circulation. Au delà de la véracité de cette vidéo et de sa réelle temporalité, le travail des enfants est un phénomène qui inquiète. Dans la cité éponyme de Sidi El Houari, ils sont fort malheureusement des dizaines d’enfants, des deux sexes, dont l’âge ne dépasse pas les 14 ans, qui ont intégré de plein pied le turbulent monde du travail et ce, pour aider à subvenir aux besoins d’une famille, ayant franchi le seuil de la débine.
Ils sont généralement pour nombre de cas des victimes potentielles d’un divorce, dont certains ne connaissent même pas leur père, et tentent ainsi d’apporter leur aide à une mère ne disposant d’aucune rente. Avec le temps, certains d’entre eux ont excellé dans l’art de la récupération d’objets recyclables, qu’ils fourguent à des brocanteurs installés dans la banlieue d’Oran et ses localités limitrophes. Selon des sources concordantes, d’autres, ayant à peine l’âge d’aller au collège sont recrutés dans des ateliers clandestins pour exercer différentes tâches, plus dures les unes que les autres, en contrepartie d’un salaire dérisoire voire misérable.


Leurs employeurs, qui les traitent parfois carrément en esclaves, les préfèrent, ironie du sort, à leurs pères, qui leur réclameraient une mensualité beaucoup plus élevée en plus de leurs droits à la retraite et sur la caisse sociale, conformément à la réglementation en vigueur relative au statut du travailleur. Ils sont encore des dizaines à proposer un éventail d’articles aux automobilistes à hauteur des feux tricolores notamment et au niveau des ronds points de la périphérie de la ville où ils se disputent les faveurs des automobilistes avec les nuées de subsahariens, qui ont fui les troubles prévalant dans leur pays d’origine pour envahir la capitale de l’Ouest. Un nombre plus ou moins restreint de ces enfants travailleurs, profite des vacances scolaires pour s’adonner à une activité, qui leur rapporte un peu d’argent de poche ou pour leur permettre d’acheter des livres ou autres articles nécessaires à leurs études, ou encore pour, tout simplement, participer à pourvoir aux besoins de leur famille, à travers de maigres bénéfices rapportée de la vente.
Mais malheureusement au vu du terrible constat établi sur le terrain, la grande majorité de ces enfants a abandonné les bancs des écoles, suite à de fâcheux concours de circonstances et ce, pour aller travailler dans les marchés, les rues et mêmes dans les champs et autres lieux de travail cachés dans des conditions de vie effarantes et effrayantes. Leur priorité est de gagner un maximum d’argent.


« J’achète souvent ce que proposent ces enfants, non par besoin mais avec une intention de les aider. Il est clair qu’ils travaillent pour une cause bien déterminée. Je préfère cela qu’ils basculent dans le milieu de la délinquance ou encore de la mendicité » a commenté avec une grande amertume un automobiliste demeurant dans le faubourg d’Eckmühl. Différents autres sons de cloche se sont fait entendre à ce propos par d’autres interlocuteurs abordés par notre journal, qui ont à l’unanimité fait remarquer que ces enfants travailleurs « sont plus à plaindre qu’à blâmer ».
La plupart d’entre eux sont sous alimentés mais ne semblent à priori pas s’en rendre compte car n’ayant généralement jamais consulté un médecin, alors que d’autres souffrent d’un handicap moteur. La vie et la société n’ont vraisemblablement pas été tendres avec ces enfants. Selon un décompte officieux, plus du tiers du nombre de ces enfants sont domiciliés dans les répugnants bidonvilles ceinturant la ville d’Oran. Ces enfants, dont les parents ont, faute de mieux, élu domicile dans des masures payées rubis sur ongle, trouvent d’énormes difficultés à poursuivre jusqu’au bout leur cursus scolaires en raison notamment d’un sordide éventail de contraintes dont ils sont quotidiennement confrontés et du morbide environnement dans lequel ils évoluent.
«C’est une indigne ostentation d’un phénomène, qui ne semble à priori pas taraudé la conscience des décideurs, dont la plupart ignore l’existence d’une journée mondiale de l’enfant, destinée à attirer l’attention sur la sordide situation de ces milliers d’enfants de la rue » a fait remarquer avec une humeur bilieuse un professeur d’université domicilié dans le populeux quartier de Gambetta.
Rachid Boutlélis

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