Les pays doivent davantage coopérer pour faciliter la récupération des fonds issus de la corruption et traquer les personnes ou organisations impliquées dans les détournements.
L’appel visant à renforcer la coopération internationale en matière de lutte contre les mouvements illicites de fonds a été lancé jeudi dernier par l’Algérie. Outre la récupération des fonds mal acquis, l’Algérie, par la voix du ministre de la Justice, Garde des Sceaux, Belkacem Zeghmati, a demandé aux États de s’entraider également en ce qui concerne le volet judiciaire, l’échange d’information et l’extradition de personnes impliquées dans la corruption. Lors des travaux de la session extraordinaire de l’assemblée générale de l’ONU sur la lutte contre la corruption qui se tient du 02 au 04 juin courant par visioconférence au siège de l’ONU à New York, M. Zeghmati a déclaré que l’Algérie réaffirme «la nécessité de renforcer la coopération bilatérale, régionale et internationale en matière de recouvrement d’avoirs et d’extradition des criminels, d’échange d’informations et d’assistance juridique mutuelle, conformément aux législations nationales pour resserrer l’étau autour des parties impliquées dans des affaires de corruption et les priver de leurs acquis illicites». Le ministre a évoqué les appels de l’Algérie lancés par le passé pour alerter sur les connexions avérées entre la criminalité transfrontalière et le terrorisme. «L’Algérie qui n’a cessé de mettre en garde contre les liens croissants entre le crime organisé transnational et autres activités illégales, à l’instar du trafic de drogue, de la corruption, du blanchiment d’argent, du terrorisme et de son financement appelle, encore une fois, tous les Etats parties à honorer de bonne foi leurs engagements internationaux, à intensifier les efforts et à s’accorder mutuellement un soutien effectif», a-t-il précisé.
M. Zeghmati a affirmé que la restitution de fonds de la corruption ne doit pas être soumise à quelconques conditions. «L’Algérie souligne également que la gestion des actifs récupérés et leur utilisation relève de la seule responsabilité de l’Etat demandeur et que les actifs récupérés doivent être restitués sans conditions, avec un respect total des droits souverains des Etats», a-t-il ajouté.
La session extraordinaire de l’ONU a constitué l’occasion pour l’Algérie de réaffirmer son engagement à mettre en œuvre les conventions onusiennes en matière de lutte contre la corruption et le crime organisé transnational entre autres. Dans ce contexte, le ministre a affirmé que l’Algérie «réitère son total engagement à mettre en œuvre les Conventions des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et contre la corruption ainsi que les conventions régionales adoptées dans ce sens, et reconnaît le rôle du mécanisme d’examen dans l’amélioration de la mise en application des deux conventions onusiennes». Il a souligné la détermination de notre pays «à poursuivre ses efforts pour la révision de son règlement intérieur en vue de l’adapter aux exigences d’une lutte rigoureuse du fléau de la corruption, dans le cadre du respect de ses engagements internationaux».
Par ailleurs, le ministre a souligné les effets dévastateurs de la corruption sur les économies et sur les organismes, un phénomène qui menace même la sécurité et la stabilité des États. La corruption est «un facteur principal dans la détérioration du rendement économique et un grand obstacle dans le processus de développement et la lutte contre la pauvreté, en ce sens qu’elle amoindrit la performance des institutions et menace la stabilité et la sécurité des communautés», a-t-il affirmé, mettant en avant «le rôle primordial que jouent la lutte et la prévention de la corruption dans la réalisation des ODD, la concrétisation des valeurs de la justice et la force de la loi, ainsi que le renforcement de la confiance des citoyens envers les institutions de l’Etat». Le ministre a affirmé que la lutte contre ce phénomène est l’une des priorités de notre pays qui a mis sur pied une instance dédiée à cet objectif. L’Algérie «accorde un intérêt particulier à la lutte contre la corruption, toutes formes confondues, et œuvre continuellement à la consolidation de l’efficacité de son système national de lutte et de prévention de ce fléau», a-t-il déclaré. Preuve en est, poursuit-il, «il a été créé la haute instance de transparence, de lutte et de prévention de la corruption, en vertu de l’amendement constitutionnel 2020, outre la stratégie nationale de lutte contre ce fléau qui est en cours d’élaboration et qui implique l’ensemble des parties prenantes».
Le ministre a évoqué dans le même sillage le volet de la prévention contre la corruption et le rôle des citoyens. Il a ainsi mis en exergue «le rôle de la société civile dans la prévention de la corruption qui se renforcera davantage suite au lancement du réseau national pour l’intégrité, et la révision de la loi de prévention contre la corruption de façon à cadrer avec les défis soulevés». Le garde des Sceaux a rappelé «la mise en place, récemment, d’un nouveau dispositif pour la gestion des revenus de la corruption, ayant fait l’objet de saisie conformément aux jugements définitifs prononcés par les tribunaux compétents». Pour ce qui est des travaux de la session extraordinaire, l’Algérie se félicite des questions contenues dans sa déclaration politique, saluant l’adoption de ce document inclusif et équilibré.
M. Zeghmati a conclu son intervention en affirmant que «même si la déclaration politique ne répond pas entièrement aux aspirations de l’ensemble des parties, elle offre, cependant, des perspectives et un nouveau souffle pour l’exécution de la convention, à travers, entre autres, le traitement des questions liées à la restitution des avoirs, ce qui orientera les efforts, les moyens et l’aide technique vers les points faibles aux plans national et international».
Samir Hamiche