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Violence en France, crise économique, guerre en Ukraine… Ce qu’en pensent les Algériens

Bien faiblement impactés par la guerre en Ukraine, en raison des subventions qui touchent les céréales, les Algériens n’envoient pas moins l’évolution de la situation géopolitique avec une certaine appréhension, mais notent avec satisfaction les percées diplomatiques du pays.

Les émeutes en France ont fait une entrée subite dans le quotidien des Algériens. Le sujet a été longuement abordé durant les fêtes de l’Aïd El Adha. Les commentaires sur le comportement de la police française et le racisme ambiant dans ce corps de sécurité ont fait l’essentiel des débats, mais personne parmi les personnes interrogées n’a oublié de souligner le caractère pacifique du Hirak et de l’excellente réaction des forces de l’ordre qui ont encadré les manifestations au lieu de les disperser.
Cet épisode violent en France n’a pas totalement détourné les Algériens de la crise économique mondiale et l’état d’une grande partie du monde. Cette situation inédite que traverse une grande partie de l’humanité n’indiffère pas les Algériens. Dans leur quotidien, à l’exception d’une inflation ambiante qu’ils savent moins importante qu’ailleurs en raison des interventions de l’Etat dans le social, ils ne sentent pas encore une grande différence dans leur mode de vie, comparativement à la période précédant l’élancement de la guerre en Ukraine. Les loi de Finances 2022 et 2023 sont résolument tournées vers une poursuite des investissements publics, confortant ainsi le discours développé par plusieurs membres du gouvernement, à savoir que l’Algérie est véritablement à l’abri de la crise pour plusieurs années encore. La réalisations des programmes de logements atteste de cette volonté de l’Etat que les Algériens ressentent vraiment dans leur quotidien.
Cela n’interdit pas aux citoyens de suivre avec beaucoup d’attention l’évolution de la situation économique dans le pays et à travers le monde. Ils constatent pour nombre d’entre eux que les grands travaux engagés par l’Etat, occupant des dizaines de milliers de travailleurs algériens n’ont pas baissé de cadence. «Pour moi, c’est l’indicateur le plus important de l’apparition de la crise dans notre pays», note un cadre dans une entreprise publique. Il affirme n’avoir pas oublié les dures années 80, où « du jour au lendemain de grands chantiers ont cessé leur activité, mettant beaucoup de travailleurs du bâtiment et des travaux publics au chômage». Il dit avoir un mauvais souvenir de cette période. «Vous savez, il n’y a pas pire pour un enfant que de voir son père ou son grand frère inquiet de ne pas trouver du travail», relève notre interlocuteur.
Cette inquiétude n’est présentement pas à l’ordre du jour. Une vision très optimiste de l’avenir immédiat de l’économie nationale, d’autant que la guerre en Ukraine a eu un effet dopant sur les cours du pétrole. Le cadre en question relève également les nouvelles orientations favorisant les exportations hors hydrocarbures. Mais cette analyse tranche avec l’avis de Kamel, chômeur de son état et bénéficiant de l’allocation chômage, il dit craindre de ne pas trouver du travail. «Même si l’Etat m’accorde un pécule pour sauvegarder ma dignité, il reste qu’un travail est toujours plus intéressant», souligne-t-il. «Je trouve des difficultés à trouver du travail ces derniers mois. Je pense que le privé a peur d’être touché par la crise, alors il anticipe».
Cette vision est de tout optimisme, actuellement nourri par les autorités est partagé par de nombreux algériens, dont certains commencent déjà à réfléchir à l’après embellie. «J’ai quelques économies que j’ai déposées à la banque et avec cette crise, je ne sais plus quoi faire. Faut-il acheter de l’or pour prévenir une dépréciation brutale du dinar ? », s’interroge Mohamed, un maçon, qui a fait de bons chiffres d’affaires, les années d’après covid-19.
Interrogé sur son carnet de commande depuis l’apparition de la crise économique en Europe, notre maçon avoue que le rythme du travail n’a pas baissé pour ce qui le concerne, mais prévient que « les coups d’arrêt dans notre secteur sont brutaux », affirme-t-il, en argumentant : « il suffit que le prix de l’un des matériaux de construction flambe en rapport avec la crise mondiale, pour que les chantiers cessent de tourner dans la semaine».
Cette prudence que certains pourraient qualifier d’excessive, semble s’imposer comme une donne permanente dans le comportement des Algériens qui ont assez mal vécu les conséquences de la baisse des prix du pétrole en 1986. Mais ils constatent tous que les choses ont changé et que la gestion de toutes les situations poussent à l’optimisme dans un pays qui est en train de réussir son décollage économique et qui se place comme une puissance régionale aux portes de son adhésion aux Brics en diversifiant son économie et ne plus dépendre exclusivement des hydrocarbures.
Anissa Mesdouf

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