La nécessaire préservation du patrimoine urbain historique
Il y a quelques jours, un quotidien de la presse nationale a révélé la «découverte» par une architecte chercheuse algérienne d’une ancienne bâtisse du système de fortification espagnol construit au 18éme siècle pour encercler la ville d’Oran.. Les ruines d’un fort nommé San Fernando, qui serait resté caché des siècles durant dans un quartier populaire d’Oran.
L’information a été publiée une première fois le 23 juillet 2025 dans la revue italienne « Science de la conservation du patrimoine culturel » et a laissé entendre qu’il s’agissait d’une «découverte architecturale inédite et majeure impliquant la nécessité d’engager des opérations urgentes de sauvegarde et de préservation de ce monument inscrit au patrimoine historique colonial espagnole». L’emplacement de ce vieux fortin espagnol aurait été «découvert» au quartier populaire Haï Mahieddine, ex-Eckmühl, par Raja Farhat suite à des recherches menées dans le cadre de sa thèse de doctorat en architecture.
Il s’agit, explique-t-elle, «d’une ancienne maison espagnole construite il y a très longtemps par une famille d’origine espagnole qui tenait à conserver l’aspect architectural de l’édifice militaire ». Il est vrai que malgré les transformations et les extensions anarchiques réalisées après l’indépendance, le site a conservé quelques pans de sa structure intacte, mais reste aujourd’hui plutôt méconnaissable et camouflé au milieu d’un espace de vieilles habitations délabrées ou en ruine.
Selon de fins connaisseurs de l’histoire urbaine d’Oran, la construction de ce fort San Fernando au 18eme siècle, constituait l’un des derniers éléments du système défensif de fortification espagnol autour de la ville d’Oran. Mais bien qu’il soit déjà cité dans bon nombre d’ouvrages sur l’histoire de la ville, dont celui du défunt Houari Chaila, «Si Oran m’était contée…», cette annonce de «découverte» de l’emplacement du fort San Fernando, semble résonner comme un haut fait majeur, «historique et important pour la mémoire collective». Au point où certains commentateurs revendiquent déjà sa réhabilitation et sa restauration au nom de la «promotion du secteur touristique».
Il est vrai que tout le système de fortification militaire installé par les espagnols pour conserver la prise d’Oran, avec ses forts, ses remparts et ses tunnels souterrains, mérite bien une démarche efficace de restauration et de valorisation. Il se trouve, malheureusement, qu’en ce domaine bien trop d’opérations et de projets parfois annoncés restent dans l’expectative et souvent oubliés depuis des lustres.
On se souvient par exemple de cette ancienne association créée pour la préservation du patrimoine qui militait en vain pour l’aménagement du célèbre fort de Santa-Cruz en musée de la ville.
Ou pour la réhabilitation de l’ancien hôpital Baudens à ce jour abandonné à l’effritement au quartier de Sidi El Houari. Ou encore de ces projets annoncées chaque décennie pour la restauration de la mosquée du Pacha, du Palais du Bey ou encore du vieux quartier historique de Sidi El Houari. Les mauvaises langues locales se demandent de leur côté en quoi la restauration de ce qui reste de cet ancien fort espagnol de San Fernando, plutôt méconnu par les Oranais anonymes, pourrait contribuer, comme le prétendent certains commentateurs, à «une réhabilitation et valorisation de l’histoire urbaine de la ville». Une ville déjà bien pénalisée en ce domaine par une longue série d’échecs, de retards et de cruels renoncements…
Par S.Benali