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Incivisme des citoyens et incompétence des responsables:
La lamentable dépravation du centre ville d’Oran

La répugnante décrépitude des grands boulevards d’Oran, qui jadis n’avaient rien à envier aux grandes métropoles du Vieux continent, suscite un pincement aux cœurs chez les anciens oranais.

Suprême ironie, la prestigieuse cité éponyme de Sidi El Houari, capitale de l’ouest, qui a été classée, dans un passé encore vivace, parmi l’une des plus belles villes du bassin méditerranéen, croule aujourd’hui malheureusement sous des amas d’ordures ménagères et autres déchets, qui empestent l’air et favorise la reproduction d’animaux nuisibles notamment les rongeurs.
L’affligeante désolation est flagrante et agresse le regard du plus imperturbable au centre ville, où l’incivilité se donne à cœur joie.
La prolifération des rats, à la faveur de cette répugnante dégradation, qui a enlaidi les jadis belles artères, à l’exemple de l’avenue Cheikh Larbi Tebessi (ex-Loubet) de la rue Mohamed Khemisti (ex-Alsace Lorraine) et tant d’autres, représentant tout un pan de l’histoire contemporaine de la ville, ne semble à priori plus émouvoir quiconque.
Les habitants des rues citées affirment à l’unanimité être confrontés à une invasion de rongeurs.
«Le spectacle est terrifiant, le soir notamment, pour le badaud non averti, qui emprunte le passage Empire, reliant la rue des Aurès à celle de Mohamed Khemisti.
Des rats à la morphologie impressionnante courent dans tous les sens et représentent un danger pour les locataires des immeubles situés à l’intérieur de ce passage et ses abords immédiats »,
a déploré avec amertume et répulsion un habitant de ces lieux avant de renchérir « l’absence d’une véritable opération d’assainissement a grandement contribué à l’installation de cette situation de pourrissement au sens concret du terme, qui menace la santé publique en ces temps de pandémie du funeste coronavirus ».
Des déclarations similaires ont été formulées par d’autres locataires d’immeubles situés au centre ville, plus particulièrement ceux des abords des marchés Jean Kraft, Michelet et la Bastille, dont les appartements sont embaumés par la puanteur provenant des amoncellements de déchets et des ordures ménagères.
Celle qui a inspiré de célèbres paroliers, poètes et romanciers, se réduit insidieusement comme une peau de chagrin et ce, dans une absence collective de conscience.
Une ostentation criarde et pétulante de l’indigence des esprits en termes de sauvegarde et réhabilitation du patrimoine.
Ce triste et putride constat est encore pire pour les quartiers et la banlieue d’Oran où la décrépitude, haussée à son summum par l’incivilité, s’impose allègrement dans les paysages.
La badauderie ne s’épanouit plus, comme ce fut un temps, sur l’avenue Loubet, qui a constitué une véritable source d’inspiration dans la confection des cartes postales en souvenir d’Oran.
Son blason, qui n’avait rien à envier aux grandes métropoles du Vieux continent, se ternit au fil des jours.
Le slogan « pour une ville propre » placardé en évidence sur les camions de la collecte des ordures ménagères, semble sonner creux devant la choquante réalité.
« C’est scandaleux ! Cela fait des lustres que nous avons tiré la sonnette d’alarme, en sollicitant l’intervention des responsables concernés à travers des requêtes.
Hormis de piètres opérations de badigeonnage, rien de concret n’a été entrepris pour tenter de juguler la dégradation de l’environnement de notre lieu de résidence.
La solution de cet épineux problème est à rechercher à la source, en profondeur, la façade vient après.
Si cela s’avère nécessaire, nous devons calquer les schémas des métropoles étrangères avec lesquelles nous avons conclu des accords de jumelage» a commenté sur un ton sarcastique, un vieux riverain outré du quartier de Michelet.
Dans le quartier Derb, de Sidi El Houari, de Plateau St Michel où encore à Gambetta entre autres, nombre de familles sédentaires sollicitent la restauration de leur lieu de résidence en s’opposant farouchement à la démolition de leur point de repère.
« Je vis toujours dans cet ex-quartier israélite où j’ai vu le jour, qui n’a jamais fait l’objet d’un quelconque aménagement en dehors des démolitions.
La qualification de vieux bâti n’est en fait, à mon humble avis, et en toute vraisemblance, qu’un prétexte farfelu pour justifier l’incompétence en termes d’études de restauration et de préservation.
L’état de déliquescence du prestigieux théâtre Abdelkader Alloula, illustre parfaitement à lui seul l’image de cet affligeant état de fait »
a commenté avec une pointe de dépit un retraité de la fonction publique demeurant au le quartier Derb.
Notre interlocuteur a encore ajouté « des natifs d’Oran, installés à l’étranger, ont eu les larmes aux yeux en constatant la dégradation avancée de leur ancien lieu de résidence.
Ils étaient outrés par l’insolente indifférence des autorités locales à l’égard de tout ce précieux patrimoine livré aux mignardises de la nature, qui n’a jamais été ciblé par une opération d’entretien ».
Vraisemblablement, l’engouement de l’extension de la ville vers sa région Est, semble constituer l’essentiel de l’argument du renvoi aux calendes grecques d’un aménagement visant à restaurer ses incontournables repères.
Nombre d’autres habitants du centre ville ont reconnu en revanche qu’une partie de la responsabilité dans la déchéance de la ville, est à mettre à l’actif des actes d’incivisme de la part de certains citoyens inconscients et dénués de culture.
« Il suffit tout simplement de dépoussiérer les lois sanctionnant ces infractions et les décréter pour tenter d’endiguer l’apocalyptique enlaidissement de notre ville » ont-ils fait remarquer avec une humeur bilieuse.

Rachid Boutlélis

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