Les signes d’un grand changement
Ryadh et Teheran reprennent leurs relations diplomatiques. Dans la foulée de cette avancée, impensable il y a quelques semaines, le prince héritier saoudien, Mohamed Ben Salman annonce l’intention de son pays d’investir en Iran. Son père, le Roi Ben Salman, invite le président iranien à effectuer une visite d’Etat en Arabie Saoudite. Tous ces événements majeurs qui, en temps normal, prendrait plusieurs mois, ont été bouclés en quelques jours seulement. A cette «révolution» géopolitique retentissante, il faut ajouter la décision du président des Emirats arabes unis d’adresser une invitation au président Syrien, tout en affirmant que le temps était venu pour que la Syrie réintègre son siège à la Ligue des Etats arabes. Quelques semaines auparavant, c’était le prince héritier saoudien qui refusait toute idée de normalisation avec Israël. Toutes ces décisions prises au Moyen Orient rejoignent point par point les positions exprimées par la diplomatie algérienne depuis des décennies.
Les monarchies du Golfe se rapprochent des thèses défendues par Alger, jusqu’à affirmer une posture de non-alignement ostentatoire. Un rapprochement sans complexe est ainsi opéré avec la Russie et la Chine. Ryadh ne commerce plus exclusivement en dollars. Ce sont autant de signes qui révèlent un mouvement de l’axe géopolitique de la planète. Le Moyen-Orient commence à échapper à l’emprise américaine. Aussi, le projet du Grand Moyen Orient (GMO), pensé par l’administration républicaine et mis en œuvre par les démocrates, rencontre une résistance inattendue. L’administration US qui est passée de Trump à Biden pour faire oublier les phrases «méchantes» du premier, semble s’être perdue en cours de route. La Syrie n’est plus ce mouton noir sur lequel s’acharnait ses pays frères. L’Iran n’est plus l’ennemi à abattre, bien plus dangereux que l’entité sioniste. La Russie n’est plus cet empire du mal et de la corruption comme le décrit Washington. Et la Chine, enfin, n’est plus l’ogre qui mange tout sur son passage. Pour les rois et émirs du Golfe, ces Etats sont désormais respectables. Les cheikhs islamistes et autres EI et Al Qaïda qui vendaient le GMO aux Arabes ne sont plus écoutés.
Il y a à peine une année, c’est-à -dire à la veille de la guerre en Ukraine, assez peu d’observateurs croyaient possible cette évolution de la situation internationale. Mais le fait que les occidentaux se soient retrouvés isolés lorsqu’ils ont voulu sanctionner la Russie, ils ont dévoilé leur grande faiblesse et découvert au même titre qu’ils ne sont ni soutenus ni appréciés par le reste de l’humanité. Le GMO et l’arrogance occidentale ont pris un sérieux coup. Pour preuve, leur tentative de faire appuyer la décision de la CPI concernant le mandat d’arrêt contre Poutine n’a réuni qu’une quarantaine de pays sur les 200 que compte la communauté internationale. Un autre signe…
Par Nabil.G