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Niché dans une zone frontalière entre Aïn El Turck et Boutlélis:
Cap Blanc enferré en marge de la civilisation

Niché dans une zone à cheval entre la délimitation de la frontière entre le territoire de la daïra de Boutlélis et celui d’Aïn El Turck, le prestigieux village de Cap Blanc, dépendant administrativement de la commune d’Aïn El Kerma, qui s’étend sur une quarantaine d’hectares à l’intérieur d’une crique en forme de fer à cheval, jouit de vues splendides, à couper le souffle, dans un environnement en grande majorité à l’état sauvage, agréables au regard contemplatif.

Il représente un véritable pan de l’histoire contemporaine de cette contrée aux multiples facettes et renferme d’énormes potentialités touristiques inexploitées à travers ses sites surplombant la mer. Ce village est en contradiction avec sa vocation maraîchère initiale. En effet, la grande majorité de ses habitants se nourrissent généralement des gains provenant de la vente de leurs produits de pêche. Cap Blanc apparait soudainement à l’amorce d’un virage à épingle à cheveu, en contrebas d’une côte. Étranglé dans une cuvette, que les éléments de la mer ont judicieusement façonnée durant des siècles, il fait face à un petit îlot, baptisée par les conquistadors espagnols « larguerma » en arabe « enemla », la fourmi, en raison de sa forme.
« Par manque de visibilité, plus particulièrement lorsque la brume recouvre cette zone, un nombre indéterminé d’embarcations, pilotées par des marins non avertis, a embouti les récifs ceinturant cette minuscule ile, constituée essentiellement de rochers tapissés d’algues » a commenté Hamid, un habitant de Cap Blanc, pêcheur de père en fils. Notre interlocuteur a encore déclaré « A mon humble avis, il serait bien utile d’installer un signal lumineux pour éviter les accidents ». En fait, ce petit point dans la mer, à quelques miles nautiques des côtes de Cap Blanc représente un point de repère pour les pécheurs de ce village et ses alentours immédiats, qui représente leur lieu favori de prédilection et ce, en raison de l’abondance d’un éventail d’espèces de poissons. Constitué essentiellement de maisonnettes blotties les unes contre les autres, dont la peinture des façades a été écaillée par le vent, le soleil et la pluie, où serpentent des venelles tortueuses n’ayant jamais fait l’objet d’une quelconque opération de restauration, au même titre que sa principale rue, qui accède au parking mitoyen à sa grande plage, Cap Blanc n’est à priori pas encore prêt de redorer son blason.
« Les rares maraîchers, qui sont encore installés dans ce village, font plutôt dans la débrouille, pour compenser le manque flagrant d’engrais et affronter la hausse des prix de la semence. Les agriculteurs, qui sont à la merci des mandataires, trouvent d’énormes difficultés pour faire rentabiliser leurs maigres cultures. Ils arrivent juste à tirer de quoi subvenir pendant quelques jours seulement aux besoins de leurs familles. Ils aimeraient bien changer de métier mais ils ne savent pas faire quelque chose d’autre à part la culture des maraîchers, une activité que leur ont légué leurs parents » a déploré Mustapha, maraîcher de son état. Le même son de cloche s’est fait entendre chez les pêcheurs de ce village.
« Ces deux dernières années, nous avons grandement souffert avec le chamboulement enfanté par la pandémie du Covid-19 et les mesures draconiennes décidées par les autorités sécuritaires dans la cadre de la lutte contre les traversées clandestines. Notre gagne pain a beaucoup chuté par rapport aux années précédentes » a bougonné avec amertume le gérant d’un établissement de commerce versé dans l’alimentation générale. Avant d’ajouter « l’absence d’une quelconque activité culturelle ou autre programme d’animation, à même de faire sortir notre village de son hibernation, est entre autres à l’origine du triste prévalant dans notre lieu de résidence.» Notons selon le constat que les pêcheurs,, qui disposent d’un abri au niveau du lieudit le « P’tit Port », une sorte de bras presque blanc plongeant dans la mer, ont énuméré une longue liste de couacs.
« Il ne nous est pas facile de s’adonner à la pêche artisanale avec le peu de moyens dont nous disposons. Mon embarcation et mon moteur m’ont coûté les yeux de la tête. J’ai encore emprunté pour m’acquérir le matériel nécessaire. Je vis presque dans cet abri à bateau parce que je suis pris par le temps» a confié avec une humeur bilieuse un pêcheur du « P’tit Port »avant d’ajouter « pour vendre les produits de notre pêche nous sommes dans l’obligation de louer les services d’un transporteur clandestin pour se déplacer ou encore d’accepter les offres misérables des mandataires, qui se déplacent régulièrement dans notre village pour profiter de notre impasse.
Nous sommes au pied du mur et nous lançons un SOS aux responsables concernés ». Isolé du monde de la civilisation, les pécheurs et les maraîchins du village de Cap Blanc, qui est confronté à une démographie galopante, attendent depuis des lustres une réaction des autorités locales, s’identifiant à travers le lancement d’opérations d’aménagement urbain et autres projets d’utilité publique pouvant contribuer certainement à l’amélioration du cadre de vie de la population estimée à environ un peu plus de 12 000 âmes et celui du séjour pour les vacanciers habitués à cette contrée, enferrée dans une zone merveilleusement verdoyante, mais inexploitée, voire boudée.
Rachid Boutlélis

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