Des biens communaux détournés et occupés depuis plus de 30 ans…
Un ancien cinéma, relevant du patrimoine de la commune de Aïn El Turck et squatté depuis plus de trente (30) ans, vient d’être enfin récupéré par les autorités concernées et reversé aux actifs de la municipalité. Mieux vaut tard que jamais, ironisent des mauvaises langues locales qui se demandaient toujours pourquoi cette ancienne belle salle de cinéma de plein air, implantée sur le boulevard Mohamed Khemisti, en plein centre de la ville d’Aïn El Turck, a été jadis abandonnée par la Mairie et livrée à une si longue occupation illicite.
Cette infrastructure culturelle, dont la construction date de l’époque coloniale, a donc été récupérée mercredi dernier, suscitant la joie et les applaudissements exprimés sur les réseaux sociaux par les cinéphiles de toute la région. Une opération lancée par certains élus de Ain El Turk, en présence des forces de l’ordre, qui ont déployé un dispositif de sécurité pour parer à tout éventuel risque. Cette ancienne salle de spectacles a été en effet détournée de sa vocation et transformée par un opérateur privé en pizzeria, un lieu plutôt médiocre de restauration dans ce centre urbain d’Ain El Turck, une ville balnéaire à grand potentiel touristique.
Le squatteur concerné à été plusieurs fois destinataire de mises en demeure de l’Apc d’Aïn El Turck lui demandant de libérer les lieux. Les mêmes sources rappellent qu’il y a plus d’un an, en mars 2023, une autre salle de cinéma, située sur le même boulevard Mohamed Khemisti, également squattée depuis une trentaine d’années et transformée en grand magasin de vente de meubles, a été récupérée après une opération similaire. Il y a vingt ans, en décembre 2004, un ancien Wali en poste avait lui-même déploré et dénoncé le laxisme, les complicités et les carences dans la gestion communale qui avaient notamment permis le détournement et l’appropriation anarchique d’espaces urbains et de biens immobiliers divers appartenant aux communes, dans une hallucinante ambiance d’impunité et de non droit.
Des jardins publics, des locaux appartenant à la municipalité, des parcelles de plage sur le domaine maritime, et bien d’autres biens comme des fourrières municipales ou même des salles de classes délabrées ont été squattés et détournés par des privés « aidés » et encouragés par des acteurs installés dans les rouages de la vieille administration locale défaillante.
La ville d’Ain El Turk, longtemps marquée par la seule réputation de ses lieux de « récréations festives », avait trop souvent raté l’occasion de répondre à la légitime ambition de devenir une zone de tourisme, de détente, de culture et de loisirs. Le logement social et le lot de terrain à bâtir devenaient alors les enjeux-clefs d’une course effrénée au gain facile et à la prédation. Des réseaux au contour mafieux s’organisaient pour s’accaparer des biens publics et de parcelles de terrains de l’Etat pour les revendre en lots à bâtir à des familles voulant s’inscrire aux opérations de relogement.
Les oranais, parmi les plus âgés, se souviennent de bon nombre d’anciens scandales fonciers évoqués dans les archives de la presse locale.
Le parcours de gestion des anciennes belles salles de cinéma d’Oran construites durant la période coloniale reflète on ne peut mieux les échecs et la défaillance des anciennes équipes aux commandes de l’APC. Des salles qui ont été cédées en concession à des privés dans des conditions opaques et des clauses contractuelles très vagues. Même une grande salle à Oran, confiée en gestion directe à un office municipal de la culture, reste à ce jour fermée et livrée à l’abandon et à la dégradation malgré les annonces répétées de travaux de restauration lancés depuis plus de cinq ans.
L’initiative de l’APC d’AIn el Turk voulant récupérer ses salles de cinéma est à saluer à plus d’un titre et devrait servir d’exemple aux élus d’autres communes.
Par S.Benali