Le «cabas» d’importation mafieuse de produits médicaux
Le Conseil de l’Ordre des médecins dentistes (CNMD) vient de demander l’ouverture d’une enquête sur les pratiques de spéculations, réelles ou supposées, dans la commercialisation des produits d’anesthésie dentaire qui ont en effet connu ces derniers mois des pénuries et des tensions d’approvisionnement fortement dénoncés par des praticiens et des citoyens sur les réseaux sociaux. Selon des sources du ministère de l’Industrie pharmaceutique, citées par un journal, les récentes importations de 10.000 boîtes de produits anesthésiques dentaires, au mois de mai dernier et de 9.700 boites durant le mois de juin en cours ont permis d’exclure toute situation de pénurie. Et toutes les mesures, précise-t-on, ont été prises pour approvisionner les cliniques de chirurgie dentaire et les cabinets dentaires à travers toutes les wilayas du pays.
Néanmoins, malgré ces annonces de retour à la normale à travers la régulation des importations avec un ou plusieurs fournisseurs, le grand handicap qui ne cesse de nourrir la crise et les tensions réside dans la vente et la distribution des produits aux utilisateurs qui demeure perturbée par l’intervention de «vendeurs illicites» de produits anesthésiques et même de certains médicaments très demandés. Un dentiste à Oran affirme avoir effectué des déplacements à Alger et à El Eulma pour s’approvisionner en boîtes d’anesthésie après de longues heures d’attente devant ces seuls points de vente officiels ouverts pour ce produit. Sinon il faut avoir recours à ceux, de plus en plus nombreux, qui proposent des boîtes d’anesthésie importées clandestinement dans les fameux «cabas», comme s’il s’agissait de produits cosmétiques, de vêtements de luxe ou de confiseries très demandées…
Selon un médecin, observateur avisé de cet état des lieux, le phénomène du «trabendo» sur les produits médicaux s’est amplifié depuis les restrictions dictées par le gouvernement en matière d’autorisation d’importation accordées à certains centres de commercialisation de produits pharmaceutiques. Cette faille et ces carences dans le circuit officiel de distribution ne pouvait que favoriser l’émergence des pratiques illicites et frauduleuses d’importation par des réseaux mafieux et organisés qui vendent au marché noir certains produits et médicaments par plaquette et non pas par boite afin d’augmenter les prix. Même des produits anticancéreux très coûteux ne sont pas épargnés par ce fléau.
A Oran, des médecins praticiens installés en cabinet privé, dont celui du quartier HLM/USTO, ne cessent de pointer du doigt certaines officines pharmaceutiques servant de «point de recel» et de revente des produits dits du «cabas», importés par ceux qui les approvisionnent illicitement en médicaments et produits médicaux divers, non remboursables et hors de portée des bourses moyennes. « Même les simples abaisse-langues, indispensables à la consultation des enfants, deviennent rares et ont vu le prix de la boîte tripler en moins de trois mois» confie un médecin, persuadé que le fléau risque de s’amplifier si aucune mesure sévère et rigoureuse n’est prise par les pouvoirs publics.
Par S.Benali