EDITO

Le mouton de tous les sacrifices

A mesure que la date de l’Aïd El Adha approche, les Algériens voient les prix de l’ovin s’envoler. Les maquignons imposent donc leur loi au vu et su de tous. Celle-ci rend irréversible la montée de la valeur du mouton d’année en année. L’on n’a pas vu une seule fois depuis 60 années le mouton se vendre moins cher. La courbe est ascendante et aucun facteur ne semble agir sur le marché à bestiaux. La sécheresse, l’abondance des pâturages, la chute des prix des aliments sur le marché international, l’abstinence forcée des consommateurs, et même toute la volonté du gouvernement de réguler le marché, n’ont absolument à aucun effet sur le prix du mouton de l’Aïd qui n’en finit pas d’augmenter.

Pourtant, cette année particulièrement, l’Etat a réuni les conditions pour assister à une baisse significative des prix. La pluviométrie a été au rendez-vous, ces derniers mois , les aliments de bétail importés ont été défiscalisés, voire subventionnés par moment. Aucune maladie grave n’a été signalée et les éleveurs ont bénéficié de l’aide directe et indirecte des démembrements de l’Etat. Même l’électricité a été acheminée à des centaines d’exploitations agricoles, dont des élevages d’ovins. Tous ces facteurs étaient destinés à favoriser très largement une stabilisation appréciable du nombre de la filière ovine aux quatre coins du pays. A défaut d’une évolution «spectaculaire» du marché, l’on espérait au moins une stagnation des prix ou alors une légère indexation aux prix de la vie.

Mais penser cela, c’est compter sans l’appétit vorace des intermédiaires qui, en prenant le contrôle de toute la filière ovine, agissent à leur guise. Ils font et défont les pronostics et mettent le peuple devant une situation tout à fait incongrue, mettant des centaines de milliers de pères de famille devant un véritable dilemme annuel : se passer d’un rite cher à notre religion ou s’endetter lourdement au point de déstabiliser le budget familial. Car en plus de la dépense de l’Aïd El Adha, les Algériens ont dû faire face à celle du ramadhan, de l’Aïd El Fitr et sont censés se préparer à la rentrée scolaire, elle-même génératrice de dépenses supplémentaires.

Qu’on en juge donc. Le mouton se négocie à 50.000 dinars et plus. l’équivalent d’un salaire moyen en Algérie. deux fois le SNMG. Mais en regardant de plus près, on saura que cette somme a de tout temps été la même. Le mouton du Sacrifice a toujours coûté deux fois le SNMG. Il serait inutile de vanter un passé prétendument plus clément, lorsque les moutons se négociaient à 10.000 ou 15.000 Dinars. A cette époque, cette somme équivalait à une mensualité d’un revenu moyen en Algérie. A croire que les maquignons étaient et sont toujours de redoutables hommes d’affaires qui reconnaissent le plafond de dépense d’un foyer algériens. D’ici à l’Aid El Adha tout le monde va jaser, mais au final, les 3 millions de moutons seront bel et bien sacrifiés.

Par Nabil.G

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