EDITO

Le saut dans l’inconnu

A peine sorti du marasme que voila le Soudan qui replonge dans l’incertitude. Ainsi, ce lundi, l’accord de partage de pouvoir de 2019, entre les civils et les militaires, qui a suivi la destitution de l’ancien homme fort du pays, Omar el Bachir, a volé en éclat, quand les militaires dirigés par le général Abdel-Fattah Burhane, ont annoncé la dissolution des autorités de transition. Une décision accompagnée par l’arrestation du Premier ministre Abdallah Hamdok et plusieurs de ses ministres.
Plusieurs soudanais sont sortis dans la rue pour exprimer leur colère face à ces nouveaux développements et ont exigé la poursuite des reformes démocratiques jusqu’à l’installation d’un gouvernement totalement dirigé par les civils. Des manifestations qui auraient fait selon des sources médiatiques plus de neuf morts. Un bilan qui risque de s’alourdir car les militaires à travers leur chef ont clairement signifié que dans l’attente de « la formation d’un gouvernement compétent, les militaires resteraient au pouvoir jusqu’aux élections prévues pour juillet 2023 ».
Le Soudan habitué aux coups d’Etat militaires depuis Jaafar al-Numeiry en passant par El Bachir, entre encore une fois dans une phase d’instabilité et d’incertitudes qui risque de compliquer encore davantage la situation dans un pays où presque tout reste à faire. Mais un pays qui a vu l’émergence d’une nouvelle génération et une société civile très politisée qui a grandement contribué à la fin de règne de l’ancien maréchal el Bachir, lâché il faut le rappeler par une grande partie de l’armée, celle là même qui aujourd’hui remet en cause le processus convenu avec les civils pour sortir le pays de ses innombrables difficultés économiques et politiques.
Le processus est ainsi brutalement arrêté par les militaires qui veulent rester seuls aux commandes tout au long de cette étape de transition. Et même s’ils contrôlent de main de fer le pays, il n’empêche que l’armée prend le risque de plonger le pays, encore une fois, dans une phase d’instabilité et de turbulences dont le Soudan auraient pu en faire l’économie.
Le coup de force des militaires ne peut être la solution aux crises multiples que connaît ce pays, et seul le dialogue le plus large possible pourra éviter le pire, comme l’a rappelé l’Algérie dans un communiqué de son ministère des affaires étrangères appelant « toutes les parties civiles et militaires à faire prévaloir le dialogue en vue de régler les problèmes et faire face aux défis sécuritaires et politiques auxquels le pays est confronté à cette étape importante de son histoire contemporaine, conformément au document constitutionnel, et à l’Accord de paix de Juba de manière à garantir la réalisation des aspirations légitimes du peuple soudanais ».
Par Abdelmadjid Blidi

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