La culture des transgressions et de l’impunité
L’anarchie urbaine est devenue l’un des fléaux inquiétants qui ne cesse de détériorer l’image de marque et le statut de la capitale oranaise. On sait, depuis des années, que la ville d’Oran et ses communes périphériques ont été livrées à une prédation foncière avec souvent la complexité de certains responsables de passage aux commandes de la collectivité locale. Au début des années 2000, les pratiques anarchiques d’attribution de lots à bâtir à des «coopératives immobilières» et les affectations de terrains à de présumés investisseurs ont permis à certains acteurs d’amasser des fortunes illicites dans une totale impunité. Certains gestionnaires qui ne vivaient que de leurs modestes salaires sont devenus en moins de dix ans de «riches notables» milliardaires, ayant leur entrée privilégiée aux antichambres du pouvoir local. Les mauvaises langues oranaises citent souvent des noms d’énergumènes connus de l’opinion, jadis des illustres inconnus, qui ont pu s’installer aux premiers rangs de la représentativité sociale, culturelle ou sportive grâce à leurs magouilles et à leurs pratiques malhonnêtes et indécentes permises par le vieux système de gestion basé sur la corruption et l’éloge de la médiocrité. Mais tandis que le vieux mode de gouvernance gangréné par la corruption à tous les étages s’est effondré, on assiste encore à la flambée des fléaux des bidonvilles et des constructions illicites à travers les communes oranaises, en particulier dans les zones les plus convoitées et les plus attractives, à Oran, Es-Sénia, Ain El Turck, Bousfer, Arzew, Hassi Bounif,… Les constructions construites anarchiquement et sans autorisation, sans le moindre souci pour l’esthétique ni pour les normes urbanistiques, sont visibles sur le foncier urbain, les terres agricoles et même sur le domaine forestier. De beaux sites sur le littoral marin sont défigurés par des constructions illicites de plus en plus «grandes et consistantes» parfois implantées au bord des falaises. Malgré les efforts indéniables des autorités locales visant à stopper et éliminer le phénomène, les constructions anarchiques et illicites, tout comme la prolifération des bidonvilles, semblent devenir une dangereuse menace pour la crédibilité de l’Etat et de ses institutions. Selon un éminent sociologue oranais, la ruée vers l’occupation et l’appropriation du foncier dans n’importe quelles conditions n’est que le résultat des fractures et des pressions cumulées des décennies durant par une société trop longtemps bercée à la culture de l’impunité et des transgressions.
Par S.Benali