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L’Algérie évacue ses ressortissants | Soudan : la poudrière

Le rythme accéléré des évacuations renvoie à une situation de panique dans ce pays et fait craindre le pire pour les civils soudanais, dont des milliers ont déjà quitté le pays pour se réfugier au Tchad voisin.

Sur ordre du président de la République, le ministère des Affaires étrangères a lancé, hier, une opération d’évacuation des ressortissants algériens établis au Soudan. Un communiqué du ministère a également souligné que «tous les moyens ont été mobilisés pour assurer la réussite de l’opération». La même source a en outre affirmé suivre de près la situation au Soudan à travers une cellule de crise mise en place à cet effet, sous la présidence du Secrétaire général du ministère. Aussi les ressortissants algériens se trouvant dans ce pays sont appelés à faire preuve de vigilance et de prudence et à rester en contact permanent avec les services du ministère des Affaires étrangères et son antenne à Khartoum.
Cette évacuation qui intervient en même temps que d’autres opérations du même ordre, lancées par de très nombreux pays, confirme la dégradation à vue d’œil de la situation sécuritaire au Soudan. En effet, le rythme accéléré des évacuations renvoie à une situation de panique dans ce pays et fait craindre le pire pour les civils soudanais, dont des milliers ont déjà quitté le pays pour se réfugier au Tchad voisin. Les violences, principalement à Khartoum et au Darfour (ouest), ont fait selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) plus de 420 morts et 3.700 blessés.
La proportion que prennent les violence fait craindre l’éclatement d’une longue guerre civile destructrice pour le pays. Il y a un risque réel de voir l’ingérence dans le conflit interne de puissances et groupes armés de la région. Les experts n’écartent pas la possibilité d’une gigantesque crise migratoire. Le Soudan est peuplé par plus de 40 millions de personnes. On imagine l’ampleur du drame humanitaire à venir. Une perspective grandement destabilisatrice pour une région déjà très fragile.
Le Soudan a plongé dans le chaos vers la fin du mois sacré du Ramadhan, otage des combats entre le général Abdel Fattah al-Burhane, chef de l’armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le putsch de 2021, et son numéro deux Mohamed Hamdane Daglo, chef des paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).
L’est du Tchad accueille déjà plus de 400.000 réfugiés soudanais et «les nouveaux arrivants font peser une pression supplémentaire sur les services publics et les ressources du pays qui sont déjà surchargés», affirme le HCR dans un communiqué. Fin février, l’ONU affirmait déjà que plus du tiers de la population au Soudan aurait besoin d’aide humanitaire en 2023, en raison de la faim et de l’augmentation du nombre de déplacés. «Je m’attends vraiment à un exode massif de millions de civils au premier cessez-le-feu», a affirmé Cameron Hudson, analyste du Centre pour les études stratégiques et internationales (CSIS) à Washington.
Les combats, entamés le 15 avril, s’étendent de jour en jour. De nouveaux quartiers de Khartoum et de nouvelles régions du pays, notamment dans le Darfour, sont aspirés dans un conflit qui couve depuis des mois. «Des millions de civils sont pris dans les combats et manquent rapidement de produits de première nécessité», écrit l’ONG International Crisis Group. Selon elle, «le conflit pourrait rapidement glisser vers une véritable guerre durable», contaminant les périphéries du Soudan, déjà exsangues, puis certains de ses voisins.
Jusqu’à hier, il était impossible d’entrevoir le moindre signe d’apaisement. Le pays est livré aux combattants et les ressortissants étrangers le fuient par milliers, chaque jour. Bientôt, le Soudan se transformera en zone de guerre exclusive. Il n’est pas exclu qu’il devienne ingérable. Le risque d’un effondrement total du pays est à craindre sérieusement.
Anissa Mesdouf

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